Euronext annonce en grande pompe le lancement d’un nouvel indice dit « bas carbone ». Cet indice « Euronext ESG 80 », promu notamment par BNP Paribas et Société Générale, ne vise pas un alignement sur l’Accord de Paris. Il se contente de désigner parmi les plus grandes capitalisations boursières celles qui ont les performances climatiques les moins mauvaises. Il réunit donc des entreprises à l’impact climatique majeur sans inciter à une réduction de celui-ci.

L’indice « Euronext ESG 80 » est basé sur les 300 premières capitalisations boursières, avec parmi elles de très grandes entreprises qui posent de nombreux problèmes environnementaux et climatiques comme sociaux et de gouvernance. Parmi celles-ci, il exclue les entreprises qui possèdent les pires pratiques sociales, de gouvernance et environnementales. Comme le responsable des activités data et indices chez Euronext l’explique lui-même : « Nous avons appliqué un premier filtre en retirant les 20% les moins performants d’un point de vue social, puis les 20% les moins performants sur la gouvernance. Nous avons exclu toutes les sociétés aux prises avec des controverses et enfin nous avons retiré celles impliquées dans le charbon, le tabac et les armes controversées comme les mines antipersonnel ». Ainsi, seuls les plus mauvais élèves, parmi les entreprises aux impacts les plus importants, ne peuvent y figurer.

La « performance » environnementale des entreprises de l’indice est toute relative. On y trouve notamment Vinci, très actif dans la construction de gazoducs et d’oléoducs, y compris dans les sables bitumineux du Canada. Surtout, l’alignement sur une trajectoire de réchauffement à 1.5°C et l’Accord de Paris, imposant la neutralité carbone à l’horizon 2050 et une réduction de moitié des émissions de GES d’ici 2030, n’est à aucun moment pris en compte.

De plus, ce nouvel indice arrive dans un contexte où la gestion passive, encore minoritaire en Europe est amenée à se développer, avec l’implantation croissante d’acteurs américains tels que BlackRock et Vanguard. En France, Lyxor, la société de gestion de Société Générale, a déjà 40% de fonds en gestion passive. Or, cette gestion échappe aujourd’hui aux politiques d’exclusion adoptées par les acteurs financiers. Amundi n’applique sa politique charbon qu’à une petite partie des actifs gérés sous gestion passive alors qu’ils représentent autour de 10% de ses actifs totaux, soit environ 150 milliards d’euros.

Dans ce contexte, le nouvel indice devrait à minima inclure des exclusions strictes concernant l’ensemble des énergies fossiles – et non uniquement le charbon – et ne contenir que des entreprises ayant adopté des objectifs de court, moyen et long terme pour s’aligner sur une trajectoire 1.5°C. Sans cela, il reste un indice supplémentaire qui permettra aux acteurs financiers de se donner une image « verte » à peu de frais sans pour autant changer radicalement les pratiques.