Mardi 29 septembre – OFI AM annonce une sortie du secteur pétrolier en 2050, et des premières mesures d’exclusion des entreprises actives dans les secteurs des pétroles et gaz de schiste, des sables bitumineux et des forages en Arctique et en eaux profondes. Reclaim Finance salue l’approche suivie mais condamne la déconnection totale des mesures prises avec l’état d’urgence pourtant évoqué dans son communiqué. Le décryptage de l’annonce laisse penser que les majors pétrolières et gazières ne seront pas impactées par les mesures adoptées et que les seules entreprises véritablement exclues de l’univers d’investissement du gestionnaire d’actifs n’y avaient jamais été inclues.

Lucie Pinson, fondatrice et directrice générale de Reclaim Finance commente :

“OFI Asset Management a le mérite d’être le premier acteur français à reconnaître la nécessité de sortir du pétrole à l’horizon 2050 et hydrocarbures les plus risqués et polluants plus tôt. Mais les mesures annoncées sont loin d’être à la hauteur et ne répondent pas à l’urgence d’empêcher le développement de nouveaux projets, y compris gaziers. Les mesures d’étapes annoncées ne permettront pas d’atteindre le niveau de réduction d’émissions de gaz à effet de serre requis pour limiter le réchauffement à 1.5°C”.

Il faut saluer l’approche générale qui consiste dans un premier temps à exclure des énergies qui concentrent les risques ESG, climatiques et financiers, en vue de préparer l’exclusion du secteur pétrolier à une échéance ultérieure.

  • Cependant, OFI Asset Management reproduit les erreurs du scénario de développement soutenable (SDS) de l’AIE (Agence Internationale de l’Energie), duquel il dit tenir compte, et semble ainsi oublier que contenir le réchauffement de la planète à 1.5°C implique une sortie du gaz concomitante à celle du pétrole.
  • Par ailleurs, son engagement à réduire progressivement ses positions dans les entreprises du pétrole conventionnel à partir de 2040 pourrait avoir un impact très relatif étant donné le basculement des majors pétrolières vers le secteur gazier.

Concernant les positions prises sur les forages en Arctique ou en eaux profondes, il y a un décalage total entre les déclarations de OFI qui parle “d’un état d’urgence et d’une nécessaire mobilisation de tous pour préserver l’avenir de la planète et des hommes” et l’ambition des mesures annoncées.

  • Alors que la fonte de la glace en Arctique atteint des niveaux records [2], OFI Asset Management accepte le forage de nouveaux projets de gaz et de pétrole en Arctique comme en eaux profondes jusqu’en 2030. Non seulement ces projets sont, comme tout nouveau projet d’extraction d’hydrocarbures, incompatibles avec le budget carbone disponible, mais ils menacent d’accélérer encore plus le réchauffement de la zone Arctique et de perturber des zone extrêmement sensibles et riches en biodiversité.
  • Ce n’est qu’à partir de 2030 qu’OFI Asset Management commencera à exclure les entreprises qui initient de nouveaux projets et à partir de 2040 qu’il exclura les autres entreprises impliquées dans ces zones, sans aucune précision sur le rythme d’exclusion et la date à laquelle son exposition aura été réduite à zéro.

L’engagement à sortir totalement des secteurs des pétroles et gaz de schiste et des sables bitumineux d’ici 2030 apparaît comme la seule mesure vraiment substantielle annoncée par OFI Asset Management. Toutefois, il faut souligner que OFI Asset Management se garde bien de préciser comment il définit ces secteurs et si son engagement couvre toute la chaine de valeur, de l’extraction au transport ainsi que les entreprises diversifiées qui y sont impliquées, ou bien uniquement les entreprises spécialisées dans l’extraction de sables bitumineux et gaz et pétrole de schiste.

  • Une recherche financière menée par le cabinet Profundo pour Reclaim Finance montre que OFI Asset Management détenait fin mars 2020 67 millions de dollars d’investissements dans les 100 plus gros producteurs de gaz et pétrole de schiste [3], mais 90% de ses investissements allaient à deux entreprises uniquement Repsol et surtout Total.
  • OFI AM annonce exclure dès maintenant les acteurs réalisant plus de 10% de leur chiffre d’affaires dans l’extraction du pétrole, gaz de schiste et des sables bitumineux, un seuil qui sera abaissé à 5% en 2025 en vue d’une sortie totale au plus tard en 2030.
  • Les majors pétrolières et gazières qui sont impliquées dans ces secteurs y génèrent une part de leurs revenus inférieure aux seuils retenus par OFI AM et la très courte durée d’exploitation des puits de gaz et pétrole de schistes leur permet de profiter encore longuement de cette manne avant de risquer une exclusion de ses portefeuilles d’investissement en 2030. Total a récemment acquis de nombreux nouveaux puits dans les bassins de schiste états-uniens [4].

Contact presse :
Lucie Pinson, Reclaim Finance, lucie@reclaimfinance.org, +33 679543715