AG2R La Mondiale a publié le mois dernier une politique climat comprenant de nouvelles mesures spécifiques au secteur du charbon. Passée inaperçue lors de sa mise en ligne, nous revenons dessus alors qu’il ne reste plus que deux mois aux acteurs financiers de la place financière de Paris pour adopter une politique de sortie du secteur du charbon.

Rappelons-nous, le 2 juillet 2019, la place financière de Paris, à travers les fédérations professionnelles, s’engageait à ce que ses membres, banques, assureurs et investisseurs, se dotent d’ici mi 2020 d’une stratégie de désengagement global du secteur du charbon. L’objectif final signalé dans leur communication : contribuer à l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Deux mois avant la date annoncée, le bilan est bien maigre: AG2R La Mondiale devient le 5ème acteur français à tenir promesse. L’assureur exposé au charbon via ses investissements rejoint alors Crédit Agricole, La Banque Postale Asset Management, AXA et Crédit Mutuel.

Les mesures adoptées par les 5 bons élèves de la place financière de Paris diffèrent. Mais des tendances structurantes apparaissent. La politique d’AG2R La Mondiale nous donne l’opportunité de disséquer ce qu’on doit trouver dans les politiques de sortie du charbon:

  • Tout d’abord les bons horizons de sortie. D’après Climate Analytics, les pays européens et de l’OCDE ne doivent plus produire d’électricité à partir du charbon après 2030, et les autres pays doivent aussi sortir de cette énergie polluante d’ici 2040. AG2R La Mondiale vise une sortie d’ici 2030, ce qui peut s’expliquer par son univers d’investissement principalement européen. Cependant, comme expliqué au dernier point, tenir cet objectif va obliger AG2R La Mondiale à pousser certaines entreprises comme Engie à fermer ses centrales à charbon hors Europe ou OCDE d’ici 2030.
  • Une exclusion de tous services financiers toutes les entreprises qui prévoient la construction, le développement ou l’acquisition de projets de centrales, mines, infrastructures charbon. La Global Coal Exit List (GCEL) en compte un peu plus de 400. Ce critère découle du bon sens : s’il faut sortir du charbon, les entreprises qui vont dans la direction strictement opposée ne méritent pas d’être soutenues. AG2R La Mondiale l’a bien compris.
  • Une exclusion des entreprises très ou trop exposées au charbon pour en sortir dans les temps impartis par la science climatique: AG2R La Mondiale exclut les entreprises qui tirent plus de 25% de leurs revenus ou de leur production d’électricité du charbon ; celles qui ont plus de 10 GW de capacité de production d’électricité à partir du charbon ou qui produisent plus de 10MT de charbon par an. Ces critères ne correspondent pas exactement à nos recommandations mais AG2R La Mondiale s’engage à les revoir à la baisse tous les deux ans afin d’avoir une exposition nulle en 2030.
  • Enfin AG2R La Mondiale appelle les entreprises restantes en portefeuille à adopter en 2020 un plan de fermeture de leurs actifs charbon, en vue d’une sortie totale d’ici 2030. Parmi les acteurs concernés se trouvent deux des premiers opérateurs européens : Engie et Enel. Pas une mince affaire car les deux opèrent de nombreuses centrales à charbon dont plusieurs hors de l’Europe ou de l’OCDE pour Engie.

En adoptant ces critères, AG2R La Mondiale s’inscrit fermement sur une trajectoire de sortie du charbon alignée avec Paris. De plus, il faut noter que AG2R La Mondiale utilise la base de données de référence, la Global Coal Exit List, pour identifier les entreprises actives dans le secteur du charbon. Cette base de données, déjà utilisée par des acteurs tels qu’AXA, Crédit Mutuel, Zurich, La Banque Postale Asset Management, est aussi recommandée dans les guides de bonnes pratiques publiés par l’Association française de la gestion financière (AFG) ou la Fédération française de l’assurance (FFA).

A ce jour, seulement 5 acteurs sur les centaines d’acteurs financiers français ont pour l’instant suivi l’engagement pris le 2 juillet 2019. D’autres se sont essayés à l’exercice, comme par exemple Société Générale ou BNP Paribas, mais leurs engagements demeurent insuffisants pour les placer sur une trajectoire de sortie du charbon alignée avec les objectifs de Paris. Il leur reste deux mois pour rectifier le tir.

Poursuivre la lecture :