Jeudi 3 septembre – Une semaine avant la réunion des gouverneurs de la BCE du 10 septembre, les nouvelles recherches de Reclaim Finance montre qu’attendre 2022 (1) pour conditionner le quantitative easing nous enferme dans un monde dépendant au gaz naturel. En effet, les 1700 milliards d’euros d’actifs achetés par la BCE en 2020-2021 (2) continueront à soutenir la croissance du secteur du gazier et de ses grands développeurs de projets. Reclaim Finance appelle les gouverneurs à prendre des mesures immédiates.

Les compagnies gazières se placent au centre de la transition énergétique européenne (3). Le quantitative easing de la BCE a conforté ce discours en soutenant 24 entreprises gazières opérant 123 centrales à gaz et 48 sites d’extraction en Europe, 96 pipelines gaziers et 97 terminaux de GNL dans le monde.

Les entreprises bénéficiant des achats d’actifs prévoient 62 nouveaux projets gaziers. 4 entreprises sont responsables de 45 projets : Total, Shell, Engie et Enel. Total et Shell développent 36 projets à eux seuls.

« Le gaz naturel attire les dirigeants européens avec la promesse de légères baisses d’émissions à court-terme, tout en enfermant l’Europe dans un système à forte intensité carbone dépendant des énergies fossiles. La BCE ne peut valider cette rhétorique en soutenant des entreprises responsables de 62 nouveaux projets gaziers. Elle doit immédiatement exclure les entreprises dont les pratiques sont incompatibles avec l’Accord de Paris de ses achats d’actifs, en commençant par celles qui développent de nouveaux projets fossiles. (4) » souligne Paul Schreiber, chargé de campagne chez Reclaim Finance.

En réponse à la crise du Covid-19, la BCE prévoit d’acquérir 1470 milliards d’euros d’actifs en 2020-2021, soit plus de 50% de son bilan au 1er juin 2020. Dès mai 2020, Reclaim Finance soulignait que les achats de la BCE bénéficient à 38 entreprises des énergies fossiles, dont 10 du charbon (5). Sous pression (6), la BCE a déjà admis qu’une révision de ses achats d’actifs était nécessaire (7). Pourtant, elle refuse de prendre les mesures pour mettre immédiatement fin au soutien apporté aux énergies fossiles.

En soutenant des entreprises qui souhaitent fortement étendre leurs activités gazières, la BCE ferme les yeux sur les nombreuses conséquences que celles-ci peuvent avoir sur les communautés locales, les droits de l’Homme, le climat et la biodiversité.

« De nouveaux projets gaziers sont de nouveaux dangers pour la biodiversité, les droits des populations indigènes et les droits de l’Homme. La BCE achète notamment les titres de Total, dont le projet gazier phare au Mozambique renforce les conflits locaux, la militarisation et contraint les populations à fuir. (8) » conclut Paul Schreiber, chargé de campagne chez Reclaim Finance.

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Contacts :

Paul Schreiber, chargé de campagne | paul@reclaimfinance.org

Lucie Pinson, Directrice | lucie@reclaimfinance.org | +33 6 79 54 37 15

(1) La BCE a indiqué réexaminer ses achats d’actifs dans le cadre de sa révision stratégique. Celle-ci ne sera pas achevée avant mi-2021 et pourrait être reportée. La BCE a déjà décidé que la consultation publique restera ouverte jusqu’à fin octobre 2020, et non fin août comme initialement prévu. La révision n’aura aucun effet avant 2022.

(2) La BCE a commencé par acheter 120 milliards d’actifs supplémentaires avant de créer un programme spécifique (Pandemic Emergency Purchase Program – PEPP) permettant – à la suite de deux décisions – l’achat de 1350 milliards d’euros d’actifs en 2020-2021. En prenant en compte les achats prévus avant la crise, la BCE devrait acquérir 1 700 milliards d’actifs en deux ans.

(3) Voir : Reclaim Finance, Behind the Curtain: When the gas and nuclear lobbies reshape the EU Sustainable Taxonomy, août 2020.

(4) Pour des propositions détaillées, voir la conclusion du Quantitative easing et climat : le sale secret de la BCE de Reclaim.

(5) Voir : Reclaim Finance, Quantitative easing et climat : le sale secret de la BCE, mai 2020.

(6) https://reclaimfinance.org/site/2020/06/04/la-bce-maintient-ses-soutiens-financiers-aux-pollueurs/

(7) Voir l’interview de Christine Lagarde dans le Financial Times à la télévision française. La BCE a récemment mis son question/réponses sur le CSPP à jour, il indique désormais : “the ECB shares the view that an awareness of environmental issues, together with ethical and socially responsible behaviour, are important for society and actively supports several initiatives in this context beyond the purchase of green bonds under the CSPP.”, are important for society and actively supports several initiatives in this context beyond the purchase of green bonds under the CSPP.”

(8) Les Amis de la Terre France, De l’eldorado gazier au chaos, juin 2020.