Le 8 juillet 2021, la BCE a publié la très attendue révision de sa stratégie monétaire. Si celle-ci marque un tournant, en mettant fin à des décennies d’aveuglement face aux enjeux environnementaux, les actions concrètes qu’elle implique sont largement insuffisantes, avec des lacunes et incertitudes majeures et un calendrier de mise en œuvre lent. Trois jours avant la première réunion monétaire que les dirigeants de la BCE tiendront depuis l’adoption de leur stratégie – le 22 juillet – Reclaim Finance, Greenpeace, 350.org et le Koala Kollektiv mettent en avant les mesures essentielles à mettre en œuvre pour tirer pleinement parti de la nouvelle stratégie et passer de la prise de conscience climatique à l’action.

Comme les dirigeants de la BCE l’avaient laissé entendre, le changement climatique est l’une des grandes questions abordées dans sa nouvelle stratégie, avec une feuille de route consacrée aux actions connexes. Il s’agit d’un tournant : mettant fin à des décennies d’aveuglement face aux enjeux environnementaux, la banque centrale s’efforcera de prendre en compte la menace climatique et s’engage à « refléter plus systématiquement les considérations de durabilité environnementale dans sa politique monétaire ». Confirmant les déclarations des membres de son conseil d’administration, la BCE reconnaît que l’intégration du climat est requise par ses mandats primaire et secondaire.

Toutefois, 31 ans après le premier rapport du GIEC et six ans après la COP21, la BCE est déjà en retard en matière de lutte contre le changement climatique. La force de son nouvel engagement devrait donc être mesurée par les actions qu’il implique et leur calendrier de mise en œuvre. Malheureusement, à ce niveau, la feuille de route de la banque n’est pas à la hauteur, avec des lacunes et des incertitudes majeures et un calendrier de mise en œuvre lent. Elle devra être adaptée pour que la banque centrale puisse à la fois remplir véritablement son mandat et répondre à l’urgence climatique.

Dans leur déclaration, les quatre organisations mettent en avant deux séries de recommandations pour tirer pleinement parti de la nouvelle stratégie de la BCE :

  1. Travailler pour (et non plus contre) les objectifs de l’UE, en arrêtant immédiatement de soutenir les entreprises dont l’activité est incompatible avec les objectifs de réduction des gaz à effet de serre de l’UE et en s’efforçant de soutenir les objectifs de l’UE. Il s’agit notamment d’exclure less entreprises qui développent des projets d’énergies fossiles des achats d’actifs et du cadre de garanties (collateral framework) de la BCE, conformément à la science climatique et au récent scénario Net-zero de l’AIE.
  2. Tenir compte de l’urgence climatique et des risques qu’elle représente, en agissant maintenant sur la base des informations disponibles pour atténuer les risques liés au climat et en prenant des mesures de précaution avant la mise en place de solutions complètes. Un mouvement qui implique une accélération de l’ensemble du calendrier de mise en œuvre des propositions de la BCE, ainsi que des mesures spécifiques pour prendre en compte les risques concentrés dans les actifs liés aux énergies fossiles.

Paul Schreiber, chargé de campagne chez Reclaim Finance, explique : « La nouvelle stratégie climatique de la BCE marque une prise de conscience bienvenue des enjeux climatiques. Malheureusement, la banque est en retard sur son temps. Sa stratégie est largement insuffisante quand il s’agit de passer à l’action, avec des mesures qui réduisent l’impact environnemental de la banque centrale et du système financier européen. En suivant son plan, la BCE continuera ainsi à soutenir les pollueurs pendant au moins plusieurs années, ne s’alignera pas sur les objectifs climatiques de l’UE et n’avancera dans sa mise en œuvre qu’à un rythme d’escargot. Face à ce constat, nos recommandations aideraient la BCE à être à la hauteur de la tache en contribuant à l’alignement du système financier de l’UE sur l’Accord de Paris. »

Lire la déclaration complète (en anglais)