Le 12 puis le 18 mars, la BCE annonçait 870 milliards supplémentaires de rachat d’actifs (Asset Purchase Program) via une augmentation de 120 milliards de ses programmes de quantitative easing et la création d’un « Pandemic Emergency Purchase Program » (PEPP) doté de 750 milliards.

Au total, ce seront 1010 milliards d’euros de rachats de titres qui seront réalisés sur l’année, soit 38% des titres détenus par la Banque en février 2020. Ces fonds permettent d’acheter :

  1. Des obligations d’états, de collectivités ou d’organisations internationales via le Public Sector Purchase Program (PSPP) ;
  2. Des obligations d’entreprises, avec une maturité comprise entre 6 mois et 31 ans, via le Corporate Sector Purchase Program (CSPP) ;
  3. Des obligations émises des banques et couvertes par des actifs via le Covered Bond Purchase Program 3 (CBPP3) ;
  4. Des obligations adossées à des actifs via l’Asset-Backed Securities Purchase Program (ABSPP).

La répartition actuelle des rachats d’actifs est récapitulée dans le tableau suivant :

Calculs : Reclaim Finance ; Données : BCE
Note : données de février 2020 pour les titres détenus et de décembre 2019 pour les titres éligibles

 

La BCE utilise une clef de répartition des achats qui limite les achats de dette souveraine à un tiers de la dette d’un état et les achats d’autres titres à une part proportionnelle à la quote-part de chaque pays dans le capital de la BCE. Cette clef est maintenue mais pourrait être réévaluée par la suite (1).

Les calculs proposés reposent donc sur deux hypothèses :

  1. Le maintien de la clef de répartition pour la détention de dette souveraine ;
  2. La suppression de celle-ci, avec un alignement de la répartition des nouveaux fonds sur la répartition existante.

A partir de ces hypothèses, on peut alors évaluer l’effet des nouvelles mesures de quantitative easing en matière de financement des différentes opérations d’achats de titres :

Calculs : Reclaim Finance ; Données : BCE
Note : données de février 2020 pour les titres détenus et de décembre 2019 pour les titres éligibles

 

En reprenant les analyses de Positive Money, de l’Institut Veblen(2) et du Grantham Resarch Institute(3), on peut estimer que les seuls rachats de titres et obligations d’entreprises (CSPP) fourniraient des financements conséquents aux secteurs les plus polluants :

Calculs : Reclaim Finance

Notons que les programmes d’achat d’actifs autres que le CSPP ne sont pas dénués de conséquences environnementales. Ainsi, le soutien apporté aux états et aux banques via le PSPP et le CBPP3 a un effet variable selon la politique climatique de l’état et de la banque en question.

De plus, les modalités élargies et indiscriminées du nouveau PEPP devraient logiquement contribuer au financement des secteurs polluants qui constituent une part importante de l’économie actuelle (voir notre article L’Ordonnance de la BCE contre le coronavirus : un oubli des maux sociaux comme environnementaux).