Plan stratégique: BPCE manque une occasion de se mettre à la page

Le Groupe BPCE a publié mercredi 26 juin son plan stratégique “Vision 2030”, avec des objectifs intermédiaires pour 2026. Ce que l’on doit en retenir est clair : BPCE a définitivement mis au placard son ambition en matière climatique. Alors qu’il accuse déjà un retard par rapport aux autres groupes bancaires français, le groupe rate une nouvelle opportunité de souligner son engagement dans la lutte contre le dérèglement climatique et de prendre acte de deux impératifs : ne plus financer l’expansion pétro-gazière et augmenter massivement ses soutiens vers les solutions.

Le Groupe BPCE – Banque Populaire et Caisse d’Epargne – a présenté ce mercredi 26 juin ses orientations stratégiques pour l’horizon 2030 (1). Celles-ci sont articulées par le groupe, qui couvre toutes les filiales, le réseau de détail, la Banque de financement et d’investissement (BFI) Natixis et les filiales d’investissement et d’assurance, autour de trois piliers : la croissance, la confiance des clients en leur futur et les valeurs coopératives.

Manque à l’appel le climat dont le mot n’apparaît que trois fois parmi la cinquantaine de pages publiée. La question climatique s’était pourtant imposée comme la grande priorité de nombreux acteurs financiers français, le Groupe BPCE compris, ces dernières années (2). Le document publié ne présente aucun nouvel engagement de sa part pour contribuer à la transition écologique, hormis une timide cible sur le financement de l’aide à la rénovation énergétique (3). Les énergies fossiles ne sont quant à elles nullement mentionnées.

Aucun nouvel engagement sur l’expansion pétro-gazière

Le mot transition affiche 27 occurrences dans ce plan stratégique, renvoyant notamment à la transition énergétique. Seulement, rien n’est dit sur la sortie des énergies fossiles, ni même sur l’arrêt de leur expansion, pourtant une condition sine qua non pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5°C et éviter ses pires impacts sur les populations, les écosystèmes, ainsi que sur l’économie. Cela fait déjà trois ans que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a prévu que son scénario Net Zero (4) était incompatible avec le développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers.

Se saisir de la publication de ce plan pour faire des annonces sur le secteur pétro-gazier s’imposait d’autant plus que la banque, au cœur de l’actualité en tant que sponsor des Jeux Olympiques, accuse un retard important sur ses pairs. Toutes les autres banques françaises de premier plan ont annoncé, au plus tard en 2023, la fin des financements de projets aux nouveaux champs de pétrole et de gaz, quand BPCE n’a arrêté que ceux de pétrole (5).

Plus important encore, BPCE n’a aucune restriction portant sur les entreprises productrices de pétrole et de gaz conventionnels quand BNP Paribas, Crédit Agricole et Société Générale prévoient l’exclusion d’entreprises spécialisées dans leur production et que les deux premières ont annoncé l’arrêt des émissions d’obligations conventionnelles aux entreprises productrices de ces hydrocarbures (dont les entreprises intégrées). Ce retard n’est pas sans impact sur le climat. Un exemple : le groupe était le seul représentant français parmi les banques ayant aidé TotalEnergies à émettre sa dernière obligation. L’argent levé par ce biais risque d’alimenter les plans d’expansion de la major française, autant de projets destructeurs et contraires à la science climatique.

Un coup de frein aux financements des énergies renouvelables

Du côté des ambitions de financements aux énergies renouvelables, c’est la douche froide. La mise à jour de la cible de financement – accroître ces financements de +15% sur la période 2024-2026 pour atteindre 12 milliards d’euros (4) – semble faire bien pâle figure au regard de la trajectoire récente du groupe. En effet, sur une période équivalente, le précédent plan stratégique de BPCE avait permis d’accroître les financements aux projets d’énergies renouvelables de 3,7 milliards d’euros (2021) à 9,2 milliards d’euros (2023), soit +149% (5).

L’AIE souligne pourtant la nécessité d’accélérer le financement aux alternatives aux énergies fossiles, de manière à y allouer 6 euros pour chaque euros alloué aux énergies fossiles (soit un ratio de 6:1). C’est cependant une trajectoire bien différente qu’emprunte BPCE avec ce coup de frein assumé aux financements des énergies renouvelables.

Alors que BPCE s’affiche en partenaire premium des Jeux de Paris 2024 en vantant les valeurs de l’Olympisme telles que “se dépasser, donner le meilleur de soi-même, progresser” (8), son plan stratégique “Vision 2030” incarne pourtant tout le contraire. Il s’agit d’une occasion manquée pour le groupe BPCE, qui reste la lanterne rouge des grands groupes bancaires français sur les questions climatiques.

Notes :

  1. Vision 2030, Groupe BPCE
  2. Voir par exemple le plan stratégique de BPCE pour 2021-2024.
  3. “>1bn in individual financing for energy-efficiency renovations”, Vision 2030 – Press Release, p.3.
  4. Net Zero by 2050, A Roadmap for the Global Energy Sector, Internation Energy Agency
  5. Voir l’Oil and Gas Policy Tracker (Home – Oil Gas Policy Tracker) pour une analyse détaillée des quatre banques.
  6. Source : Communiqué de presse de BPCE, publié le 26/06/2024
  7. Source : TCFD report 2023, publié en mars 2024
  8. Groupe BPCE, Vibrer ensemble pour le sport

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2024-06-28T12:31:20+02:00