Paris, 8 septembre 2020 – Alors que la banque italienne UniCredit vient de publier une robuste politique charbon [1], Reclaim Finance, en partenariat avec 27 autres ONG [2], met en ligne le premier outil permettant d’identifier, d’évaluer et de comparer les politiques adoptées par les institutions financières du monde entier pour restreindre ou mettre fin à leurs services financiers au secteur du charbon [3]. L’outil qui sera continuellement mis à jour, est issu d’une analyse couvrant des centaines d’acteurs financiers et couvre 30 pays, de l’Australie aux Etats-Unis en passant par la France. Sur les 214 politiques charbons identifiés, seulement 16 sont de qualité suffisante pour soutenir une sortie du secteur du charbon alignée avec les objectifs climatiques. Si la France est en avance avec 15 de ces politiques, l’outil, accessible sur le site coalpolicytool.org, liste aussi 28 autres acteurs français avec des politiques insuffisantes voire des plus lacunaires.

   

Le Coal Policy Tool est la base de données la plus complète évaluant la qualité des politiques existantes par rapport à l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels. Il évalue 214 politiques charbon sur une grille de notation cohérente et transparente fondée sur cinq critères clés. Il nomme également les plus grandes banques, ré/assureurs, détenteurs et gestionnaires d’actifs sans aucune politique [4].  

En un coup d’œil, l’outil montre que :

  • Les meilleures politiques se trouvent en Europe et particulièrement en France, où l’on trouve le plus grand nombre d’institutions financières ayant adopté des politiques sur le charbon et les révisant régulièrement pour adopter des normes plus élevées.
  • Les gestionnaires d’actifs américains, qui dominent le marché mondial, sont parmi les moins performants. BlackRock est le seul gestionnaire d’actifs américain noté sur l’outil à avoir une politique sur le charbon. Cependant, l’annonce de BlackRock en janvier 2020 relevait davantage de l’effet d’annonce puisque sa politique obtient un score de 0 sur tous les critères du Coal Policy Tool, sauf un.
  • À l’exception des françaises qui ont récemment revu leurs politiques, les banques sont globalement à la traîne des ré/assureurs ; un nombre relativement plus élevé de ré/assureurs a adopté des critères d’exclusion suffisamment restrictifs en ce qui concerne les entreprises du secteur.

« L’outil va au-delà de l’identification et de la comparaison des politiques et permet aux clients, aux médias, aux institutions financières et aux autres parties prenantes de naviguer facilement dans la jungle des politiques charbon. Il vise avant tout à garantir des politiques de sortie du charbon de haute qualité qui contribuent efficacement à prévenir le chaos climatique », déclare Lucie Pinson, fondatrice et directrice générale de Reclaim Finance.

La qualité reste en effet un problème majeur. Selon l’analyse du Coal Policy Tool, seules 16 institutions financières ont une politique de sortie du charbon robuste [5]. Les premières politiques de qualité ont émergé en France et uniquement l’année dernière avec celle du groupe Crédit Agricole. Depuis, 15 autres acteurs significatifs en ont adopté une [6]; tous sont français à l’exception de UnicCedit qui vient d’annoncer une politique très similaire voire plus ambitieuse sur certains points à celles des acteurs français [6].

Lucie Pinson ajoute : « Il ne suffit pas d’adopter une politique, ce dont nous avons besoin, ce sont de bonnes politiques charbon. Les 15 institutions financières françaises distinguées dans l’outil ont été parmi les premiers acteurs mondiaux à adopter des politiques sur le charbon, mais ces politiques ont dû être modifiées à de nombreuses reprises avant de devenir suffisamment robustes pour soutenir une sortie du charbon. Nous ne pouvons plus reporter l’action dans un contexte où il nous faut désormais nous attaquer au problème du pétrole et du gaz. Les institutions financières doivent rompre avec la stratégie des petits pas et adopter de toute urgence des politiques de qualité telles que définies par notre outil ».

Si 216 acteurs financiers de taille très significative n’ont aucune politique sur le charbon, la quasi-totalité de celles existantes sont insuffisantes pour atténuer les impacts du secteur du charbon et même prévenir son expansion.

La grande majorité des politiques comportant des exclusions des entreprises actives dans le secteur du charbon se contentent de gérer le risque financier en excluant les entreprises avec une part significative de leurs activités dans le charbon. La prévention de l’impact sur le climat et les populations n’est pas posée et ces politiques permettent le maintien de services financiers à certains des plus grands producteurs de charbon ou à des développeurs de centrales à charbon de s’en sortir [7].

Yann Louvel, analyste politique à Reclaim Finance commente : “Même en France, 28 institutions financières, dont Carmignac, Covéa et Rothschild & Co n’ont pas de politique soutenant la sortie du charbon et la majorité n’a pas même exclu certaines des pires entreprises du secteur. C’est donc autant d’acteurs qui ont pris via leurs fédérations professionnelles l’engagement d’adopter des politiques de sortie mais en sont encore aux lettres d’intention [8]. Le Coal Policy Tool révèle la gravité de la situation et permet à toutes les parties prenantes, clients, actionnaires et régulateurs, de ne plus être dupes du greenwashing opéré par le secteur financier”.

Le Coal Policy Tool montre en effet que presque tout reste à faire pour soutenir la fermeture des actifs charbonniers existants dans les délais impartis pour s’aligner sur l’objectif 1,5°C [9], autant en France qu’à l’international. La tenue de l’engagement de la Place parisienne pourrait générer un fort effet d’entrainement comme l’annonce d’UniCredit tend à l’illustrer.

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Contact presse :  
Lucie Pinson, fondatrice et directrice générale de Reclaim Finance, lucie@reclaimfinance.org, +33 6 79 54 37 15.Sauvegarder