Quand les énergéticiens européens manquent à leurs engagements climatiques

25 janvier 2022

Reclaim Finance a relayé le rapport publié par Ember et la coalition Europe Beyond Coal en janvier 2022 sur les stratégies de développement de 21 entreprises européennes du secteur énergétique. Intitulé Limited Utility: The European energy companies failing on net zero commitments, le rapport montre que pas même les 16 entreprises ayant adopté des objectifs Net Zero n’ont pris les mesures nécessaires pour sortir dans les temps des énergies fossiles et déployer massivement les énergies renouvelables.

De quoi parle le rapport ?

Le rapport analyse et compare les stratégies de développement de 21 entreprises européennes sélectionnées en raison de leurs opérations dans le secteur du charbon, telles que répertoriées dans la base de données de la campagne Europe Beyond Coal. Il s’agit de BEH, CE Oltenia, ČCEZ, Drax, EDF, EnBW, ENEA, Enel, ENGIE, EPH, Fortum/Uniper, Iberdrola, Naturgy, PGE, RWE, SSE, Sev.En, STEAG, Tauron, Vattenfall et Ørsted.

Le rapport évalue les entreprises contre trois jalons à remplir, d’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE), pour conserver la possibilité d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Il s’agit de la sortie complète du charbon thermique d’ici à 2030 dans les économies avancées, et d’ici à 2040 dans le reste du monde ; d’une électricité neutre en carbone d’ici à 2035 et 2040 selon les mêmes périmètres géographiques ; et de la multiplication par six de la production d’électricité éolienne et solaire entre 2020 et 2030.

Quelles sont les conclusions du rapport ?

Bien que 16 des 21 grandes entreprises européennes analysées dans le rapport se soient engagées à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 au plus tard, le rapport montre qu’aucune d’entre elles ne prévoit d’atteindre les trois jalons scientifiques requis par l’AIE pour atteindre cet objectif. Moins de la moitié d’entre elles prévoient de respecter les critères de référence requis pour la sortie du charbon, tandis que toutes ont l’intention d’exploiter des centrales électriques au gaz fossile dans l’UE et l’OCDE au-delà de 2035. Collectivement, ces entreprises quadrupleront confortablement la capacité solaire et éolienne, qui passera de 88 GW en 2020 à 428 GW en 2030, mais elles ne parviendront pas à multiplier par six la croissance mondiale requise.

Parmi les entreprises se trouvent ENGIE. Ses prévisions, plus fortes que celles de la majorité de ses pairs, dans le développement des renouvelables, n’atteignent pas le niveau nécessaire pour un alignement avec le scénario net-zero de l’AIE. Surtout, la française prévoit un recours significatif à la biomasse malgré les études démontrant son impact nocif sur le climat et la biodiversité. Enfin, ENGIE, poids lourds du gaz en Europe, n’a pas de plan pour en sortir, contrairement à ENEL qui a annoncé sa volonté de sortir totalement du gaz d’ici à 2040.

Quelle est la demande du rapport ?

Le rapport appelle les acteurs financiers, banques, assureurs et investisseurs à intervenir pour exiger des entreprises de réelles mesures pour la décarbonation de la production d’électricité à l’horizon 2035 en Europe, et 2040 ailleurs dans le monde. Ils doivent refuser des engagements à long-terme en faveur de la neutralité carbone. Faire preuve de complaisance serait se porter complice de l’échec à limiter le réchauffement à 1,5 °C.

La crise énergétique européenne actuelle nous apprend que le continent restera vulnérable à la volatilité des prix et de l’approvisionnement énergétique tant qu’elle ne s’est pas libérée des énergies fossiles. Les acteurs financiers désireux de protéger les populations, la Nature et le climat doivent contraindre les industriels de l’énergie à accélérer le développement des renouvelables, et à sortir du charbon et du gaz suivant un calendrier compatible avec l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C.

Notes :