Le verdict est tombé, BNP Paribas regagne des places dans l’honteux classement des banques qui financent le plus les énergies fossiles.

Issu de la collaboration entre Reclaim Finance, Rainforest Action Network, BankTrack, Indigenous Environmental Network, Oil Change International et Sierra Club, et soutenu par plus de 250 organisations de 45 pays du monde entier, dont les Amis de la Terre France, le rapport Banking on Climate Change 2020, a été publié aujourd’hui. Il totalise les prêts et les émissions d’actions et d’obligations de 2 100 entreprises dans les secteurs du charbon, du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale sur la période 2016-2019.

Les 35 banques internationales couvertes ont accordé 2 700 milliards de dollars de financements aux énergies fossiles après l’adoption de l’Accord de Paris en décembre 2015. Parmi elles se trouvent les françaises BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et Natixis.

Or, si les banques nord-américaines dominent largement le classement avec 9 banques des Etats-Unis et du Canada parmi les 15 plus gros financeurs aux énergies fossiles, BNP Paribas n’est pas en reste. Ses 84,2 milliards de dollars de financements aux énergies fossiles font d’elle la 13ème banque internationale et 3ème banque européenne à financer le plus ces secteurs, bien loin devant les autres banques françaises.

Facteur aggravant pour BNP Paribas, la banque a augmenté de 72% ses financements aux énergies fossiles entre 2018 et 2019. Cela fait d’elle le premier financeur européen aux énergies fossiles en 2019.

En octobre 2018, le GIEC publie son rapport spécial sur un réchauffement à 1,5°C, un rapport qui confirme la nécessité d’accélérer l’action climatique pour éviter les pires impacts des dérèglements. Mais BNP Paribas, elle, décide d’augmenter ses financements à l’ensemble du secteur responsable en grande partie de la situation actuelle, et même de multiplier par 4 ses financements aux 100 entreprises qui prévoient le plus de nouvelles extractions de charbon, de pétrole et de gaz ainsi que d’infrastructures connexes.

En 2017, la banque a adopté une politique sur les pétroles et gaz non conventionnels qui a conduit à une réduction drastique de ses financements aux entreprises principalement actives dans les sables bitumineux et les pétroles et gaz de schiste. Mais cette politique ne couvre que les acteurs avec une part significative de leurs activités dans ces secteurs. Les entreprises plus diversifiées et notamment les majors, elles, passent à la trappe. Par exemple, Shell a bénéficié de 3,5 milliards de dollars de financements de BNP Paribas entre 2016 et 2019 bien que 60% de ses plans de développement pour les 4 prochaines années sont dans le secteur du schiste.

La loyauté de BNP Paribas à l’égard des majors est aussi démontrée par sa forte présence dans le financement de l’extraction pétrolière et gazière en Arctique ou en offshore. Avec 15 milliards de dollars de financements à l’offshore, BNP Paribas est la troisième banque internationale à financer le plus ce secteur en pleine croissance. Et malgré une politique d’exclusion sur l’Arctique, BNP Paribas demeure la 7ème banque à avoir le plus financé ce secteur depuis la COP21. Parmi les principaux clients de BNP Paribas figurent les grandes majors pétrolières et gazières ENI (8,2 milliards), Shell (3,6 milliards), BP (2,6 milliards), Saudi Aramco (1,9 milliard) et bien entendu Total (1,3 milliard).

Il faut reconnaître à BNP Paribas d’être engagé via le Climate Action 100+ dans des efforts collectifs en direction de certaines majors. Cependant, les avancées permises sur Shell ou BP sont loin de répondre aux besoins et l’absence de toute critique ou prise de position par BNP Paribas à l’égard de Total est alarmante étant donné le rôle joué par la major française dans les dérèglements climatiques.

Enfin, l’augmentation des financements par BNP Paribas aux entreprises productrices d’électricité à partir du charbon montre la vacuité des mesures adoptées par la banque depuis 2015 pour contrôler les impacts de tels soutiens. La bonne nouvelle est que BNP Paribas s’est engagé en novembre dernier à sortir du charbon. La mauvaise nouvelle est que le cap fixé n’est pas le bon puisque BNP Paribas vise une sortie du charbon d’ici 2040 pour les pays de l’OCDE (hors EU), soit dix ans trop tard pour limiter le réchauffement à 1,5°C. BNP Paribas devrait publier prochainement une nouvelle politique détaillée sur le secteur. Espérons pour le climat.