Retrait du « Say on Climate” : l’inaction du gouvernement pour la finance durable

Paris, le 10 octobre – La généralisation du Say on Climate – l’obligation pour les entreprises de soumettre leur stratégie climatique au vote consultatif de leurs actionnaires en Assemblée générale – n’a finalement pas été discutée hier par la Commission mixte paritaire. Celle-ci se réunissait pour débattre du projet de loi “Industrie verte”, dont l’amendement sur le Say on Climate faisait partie. Reclaim Finance regrette que le gouvernement et les parlementaires aient cédé à la pression des lobbys et les appelle à continuer de se mobiliser pour améliorer les conditions du dialogue actionnarial afin que les investisseurs puissent mettre en œuvre leurs propres engagements climatiques.

Lundi soir, la Commission mixte paritaire n’a finalement pas débattu de la généralisation du Say on Climate, cet amendement ayant été retiré du projet de loi industrie verte. Une décision après plusieurs semaines de tractations sous la pression des lobbys, en particulier de l’Association française des entreprises privées (Afep) [1].

Cette mesure de lutte contre le greenwashing est un minimum utile pour soutenir les investisseurs désireux d’investir de manière plus responsable, qui ne coûte rien et qui est très consensuelle. Son retrait du texte illustre bien le manque de volonté politique du gouvernement de faire avancer la finance durable.

Antoine Laurent, responsable plaidoyer pour Reclaim Finance

Lors de l’examen du projet de loi “Industrie verte” en 1ère lecture, l’Assemblée nationale avait adopté, contre l’avis du gouvernement, un amendement porté par des députés de plusieurs bancs allant de la NUPES aux Républicains en passant par la majorité visant à généraliser le “Say on Climate”. Cette mesure consensuelle, revendiquée par de nombreux investisseurs français [2] et étrangers [3], consistait à obliger les sociétés cotées à soumettre leur stratégie climatique au vote consultatif des actionnaires à travers une résolution en Assemblée générale [4].

Bien que l’amendement adopté manquait d’ambition et de précision pour encadrer correctement cette pratique émergente [5], Reclaim Finance avait appelé les parlementaires à le soutenir parce qu’il représentait une avancée utile en faveur de la finance durable. En effet, les investisseurs qui s’engagent pour le climat doivent pouvoir compléter leurs mesures d’exclusion de certaines entreprises aux activités controversées par des actions d’engagement, notamment en donnant leur avis sur la qualité des stratégies climatiques des entreprises en portefeuille [6].

Reclaim Finance appelle les parlementaires qui ont soutenu cet amendement à continuer de se mobiliser pour que le “Say on climate” devienne obligatoire et que son contenu soit encadré pour éviter le « greenwashing ». [7]

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Notes :

  1. Lettre A, La dernière manche de l’AFEP contre le « Say on climate », septembre 2023 / Loi industrie verte : quand l’AFEP tente de retourner les députés sur le « Say on Climate », Juillet 2023.
  2. Forum pour l’investissement responsable (FIR), Say on Climate.
  3. Investment Week, Investors overseeing £1.8trn in assets call for AGM votes on climate transition plans, octobre 2023.
  4. Voir l’amendement déposé par Alexandre Holroyd (Renaissance).
  5. Voir la version plus ambitieuse proposée par Reclaim Finance.
  6. L’un des arguments en défaveur de cette généralisation du “Say on Climate” serait qu’il infligerait une contrainte supplémentaire aux entreprises, notamment en vue de l’entrée en vigueur de la CSRD. Or, cette obligation d’organiser un vote consultatif (et non contraignant) porterait sur un rapport que la CSRD exige déjà (Article 19 bis relatif aux Informations en matière de durabilité). Le “Say on Climate” n’est donc pas nuisible aux entreprises, mais est un nouvel outil utile aux investisseurs désireux d’investir de manière plus responsable sur les enjeux climatiques.
  7. Le manque d’encadrement du Say on Climate ouvre la porte au greenwashing tant du coté des émetteurs – qui cherchent à donner l’impression d’agir en faisant adopter leur stratégie climat par une large majorité d’actionnaires, que par les investisseurs institutionnels, qui prétendent agir pour le climat en votant pour les “Say on climate”, ce même si ces derniers sont de mauvaises qualité (contenu incomplet, objectifs faibles et mauvaise crédibilité du plan).

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2023-10-10T11:13:00+02:00