Plans de transition : pour éviter le greenwashing, il faut des règles solides

Paris , 30 janvier 2024 – Alors que de plus en plus d’entreprises et acteurs financiers adopteront “des plans de transition climat” en réponse aux nouvelles exigences réglementaires, Reclaim Finance met en garde contre le risque de greenwashing dans un nouveau rapport (1). La raison : l’absence d’une approche standardisée pour définir ces plans de transition. En analysant 26 cadres internationaux existants (2), Reclaim Finance identifie les éléments indispensables pour garantir la crédibilité de ces plans et les signaux alertant sur leur insuffisance. Reclaim Finance appelle les entreprises et acteurs financiers à s’emparer de ces recommandations et exhorte les régulateurs européens à mettre en place des normes solides pour s’assurer de la qualité des plans de transition climat et de leur mise en oeuvre.

Objectifs de réduction des émissions, stratégie de décarbonation, stratégie d’engagement, reporting et gouvernance, prise en compte de la biodiversité et transition juste : un plan de transition solide doit comprendre tous ces élements, indique Reclaim Finance dans ce nouveau rapport qui met en avant l’importance des plans de transition pour la mise en oeuvre des objectifs climatiques. En identifiant les critères minimaux nécessaires à un plan de transition solide, le rapport permet notamment aux institutions financières de reconnaitre les entreprises qui risquent de faire du greenwashing.

Alors que plus de 920 entreprises cotées en bourse se sont fixé des objectifs de neutralité carbone (3), Reclaim Finance rappelle que les plans de transition sont un outil important pour permettre l’atteinte de ces objectifs. Toutefois, en l’absence d’une approche ou d’une norme commune, il est impossible de savoir si ces objectifs de réductions d’émissions de gaz à effet de serre sont suffisants et s’ils seront effectivement mis en oeuvre.

L’absence de normes communes et de contrôle des plans de transition laisse la porte grande ouverte à ceux qui souhaitent en faire de simples outils de greenwashing. Si nous voulons nous assurer que les entreprises élaborent des plans crédibles pour tenir les engagements climatiques et permettre une sortie des énergies fossiles, il faut établir des critères essentiels à tous. En utilisant les “signaux d’alerte” (5) que nous avons identifié, les acteurs financiers peuvent d’ores-et-déjà tirer la sonnette d’alarme lorsque le plan de transition d’une entreprise n’est pas sur la bonne voie.

Paul Schreiber, Senior Policy Advisor à Reclaim Finance (4)

Un des signaux d’alerte identifiés par Reclaim Finance est la poursuite du soutien à l’expansion des énergies fossiles : c’est le cas de la banque HSBC qui a publié la semaine dernière un document étiqueté “plan de transition” tout en maintenant ses financements au développement de la production de charbon, pétrole et gaz (6).  

Alors que l’Union européenne introduit de nouvelles réglementations exigeant des entreprises l’adoption de plans de transition climat, Reclaim Finance affirme que des normes claires sont essentielles pour que ces plans permettent d’obtenir les réductions d’émissions de carbone nécessaires et transforment les pratiques des entreprises (7).   

L’intégration des plans de transition dans le reporting, le devoir de vigilance et les règles prudentielles indique clairement que l’Union européenne a l’intention de s’appuyer sur ces plans pour atteindre ses objectifs climatiques et atténuer les risques qui y sont liés. Mais jusqu’à présent, elle n’a pas réussi à normaliser leur contenu, ni à mettre en place un mécanisme de suivi de leur mise en oeuvre. Les entreprises peuvent donc adopter des plans de transition purement « cosmétiques » qui masquent leur inaction climatique, tout en se conformant aux réglementations européennes.

Paul Schreiber, Senior Policy Advisor à  Reclaim Finance

Reclaim Finance appelle les décideurs politiques et autorités de surveillance de l’UE à définir une norme de plan de transition solide et un mécanisme d’application, et les auditeurs et acteurs financiers à tirer parti de ses recommandations pour inciter les entreprises à adopter de tels plans.

Contacts :

Notes :

  1. Corporate Climate Transition Plans: What to look for, 30 janvier 2024. Un fichier Excel donnant accès à l’ensemble de la recherche – The Transition Plan Checklist – est également disponible.  
  2. Voir la méthodologie du rapport pour plus d’informations sur les cadres examinés. 
  3. Engagements pris par les grandes entreprises suivies par le Net Zero Tracker.   
  4. Paul Schreiber est également membre de la Commission Climat de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et du Groupe consultatif technique (TAG) de l’initiative Science-based Target (SBTi). Il a contribué à l’élaboration de la méthodologie ACT for Finance.  
  5. Exemples de signaux d’alerte : des objectifs de décarbonation qui ne couvrent qu’une partie des activités de l’entreprise ou qui ne couvrent pas toutes les émissions ; des volumes importants d’investissements consacrés à des activités qui émettent des niveaux élevés de gaz à effet de serre et/ou l’absence de mesures financières pour permettre le déploiement d’activités durables ; le développement de nouveaux projets de production d’énergies fossiles ou le soutien au développement de projets d’énergies fossiles ou aux entreprises qui les développent…   
  6. HSBC a publié un document d’une centaine de pages intitulé « plan de transition » le 25 janvier 2024. Cependant, la banque n’a pas arrêté de financer le développement de la production de charbon, pétrole et gaz (voir l’analyse dans le Coal Policy Tracker et le Oil and Gas Policy Tracker de Reclaim Finance).  
  7. Les grandes entreprises devront adopter un plan de transition en vertu de la directive sur les rapports d’entreprise sur le développement durable (CSRD) et de la directive sur le devoir de vigilance (CSDDD). Les banques et les assureurs devront également définir des plans de transition à la suite de la révision du règlement sur les fonds propres (CRR/CRD) et de Solvabilité II. Les recommandations pour un plan de transition solide présentées dans l’étude aideraient les entreprises à se conformer aux normes européennes de reporting sur le développement durable (ESRS) de la CSRD et aideraient les institutions financières à répondre aux attentes de la Banque centrale européenne en matière de supervision des risques liés au climat. 

Lire aussi

2024-01-30T08:34:22+01:00