L’ARCTIQUE EST UNE BOMBE
CLIMATIQUE
Les réserves en gaz et en pétrole découvertes en Arctique pourraient consommer près de 22% du budget carbone qu’il nous reste jusqu’à 2050 pour limiter le réchauffement climatique à moins d’1,5°C. Plus la fonte des glaces s’accélère en Arctique, plus les réserves d’énergies fossiles deviennent accessibles. Or, plus il y a de projets pétroliers et gaziers en Arctique, moins l’Arctique peut jouer son rôle de climatiseur pour la planète.
En effet, les surfaces blanches de l’Arctique, noircies par la pollution, absorbent les rayonnements solaires au lieu de les réfléchir. Le réchauffement augmentant, la fonte des glaces et du permafrost devient plus rapide. Or en fondant, le permafrost libère de plus en plus de méthane qui, à court terme, a un pouvoir réchauffant 84 fois plus important que le CO2. C’est un cercle de plus en plus vicieux pour le climat et pour l’Arctique.
L’ARCTIQUE, CONVOITÉE PAR
L’INDUSTRIE PÉTRO-GAZIÈRE
On dénombre actuellement 599 champs pétroliers et gaziers dans la région Arctique, dans le périmètre précisément défini par l’AMAP (Arctic Monitoring and Assessment Programme), et environ 220 sites sont déjà en production. Malgré les conditions extrêmes et les coûts élevés, cette course frénétique pour exploiter les réserves de l’Arctique pourrait s’accélérer. L’industrie investit actuellement dans 39 nouveaux champs pétroliers et gaziers, et 338 autres gisements ont été découverts et pourraient entrer en phase de développement à tout moment. Si les entreprises trouvent les financements et les assurances nécessaires pour exploiter tous leurs gisements, les réserves en production pourraient doubler. Ce serait alors près de 22% de notre budget carbone qui partirait en fumée.
La production de pétrole et de gaz en Arctique s’intensifie déjà : d’ici à 5 ans, elle aura augmenté de 20%. En effet, malgré les défis économiques et techniques, il y a plus de 20 “expansionnistes” en train de développer de nouveaux projets en Arctique. Le champion n°1 de l’expansion est Gazprom, plus gros producteur d’énergie russe et deuxième plus gros producteur d’hydrocarbures au monde en 2020. Environ trois-quarts des réserves en pétrole et gaz de Gazprom sont localisées en Arctique ! Mais les entreprises russes ne sont pas les seules à vouloir s’implanter en Arctique: ConocoPhillips, l’industriel américain, est le 3ème « expansionniste » en Arctique et prévoit d’augmenter sa production de 36% d’ici à 2030. Près de la moitié des entreprises sont européennes avec, en tête, TotalEnergies. D’ici à 2030, la major française prévoit d’augmenter sa production en Arctique de 28%.
LA FINANCE, COMPLICE DE L’EXPANSION
PÉTRO-GAZIÈRE EN ARCTIQUE
La finance joue un rôle moteur dans l’exploitation des réserves pétro-gazières de l’Arctique. Nous avons mené l’enquête pour déterminer quelles banques et quels investisseurs se cachaient derrière les entreprises en train de développer de nouveaux forages en Arctique. Résultat des courses : entre 2016 et 2020, plus de 120 banques ont octroyé 314 milliards de dollars aux entreprises dites “expansionnistes” en Arctique, sous la forme de prêts ou d’émissions d’obligations. A elles seules, les quatre plus grandes banques françaises (BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale et BPCE/Natixis) ont financé les « expansionnistes » à hauteur de 32 milliards de dollars.
Les entreprises qui développent de nouveaux projets pétro-gaziers en Arctique sont aussi soutenues par de nombreux investisseurs. En mars 2021, des centaines d’investisseurs détenaient 272 milliards de dollars dans ces mêmes entreprises, en actions ou obligations.
A elles seules, 30 banques ont octroyé 254,2 milliards de dollars aux principaux « expansionnistes » en Arctique, soit plus de 80% des soutiens totaux. Parmi elles, des banques qui se sont pourtant engagées à restreindre leurs soutiens financiers aux activités pétro-gazières en Arctique : JP Morgan Chase (18,6 milliards de dollars octroyés entre 2016 et 2020 – 1er financeur des « expansionnistes »), Barclays (13,2 milliards de dollars – 4ème plus gros financeur), Citigroup (12,2 milliards de dollars – classé 6ème) et BNP Paribas (11,8 milliards de dollars – classé 7ème). Alors que BNP Paribas et HSBC ont mis en place une politique Arctique depuis plusieurs années, ils sont aussi les premiers soutiens bancaires aux « expansionnistes » en Arctique en 2020.
Parmi les centaines d’investisseurs, les trente plus gros soutiens ont soutenu les « expansionnistes » de l’Arctique à hauteur de 162,6 milliards de dollars. En tête : BlackRock (investisseur n°1 avec 28,5 milliards de dollars), suivi de près par Vanguard (21,6 milliards), Crédit Agricole via Amundi (12,9 milliards et 3ème plus gros soutien aux expansionnistes). Seulement deux des 30 plus gros investisseurs ont une politique en place. Etrangement, alors que la banque Crédit Agricole a une politique d’exclusion en Arctique, sa filiale Amundi n’en a pas.
BANQUES, ASSUREURS ET INVESTISSEURS
NE PROTÈGENT PAS L’ARCTIQUE
Un nombre croissant de banques, d’investisseurs et d’assureurs s’engagent à limiter leurs soutiens aux opérations pétro-gazières en Arctique, et pourtant les soutiens financiers ne semblent pas diminuer. Les politiques adoptées ne permettent pas de stopper le développement de nouveaux projets en Arctique pour plusieurs raisons.
- Aucun des acteurs financiers listés dans le rapport de Reclaim Finance ne s’engage à cesser de soutenir les entreprises qui développent de nouveaux projets pétro-gaziers en Arctique.
- Tous les acteurs financiers limitent le champ d’application de leurs politiques à des sous-parties de l’Arctique. Parmi les 100 banques, investisseurs et assureurs analysés, pas un seul ne s’engage à protéger la région Arctique, telle que définie par l’AMAP, qui est la seule entité à prendre en compte des facteurs climatiques et environnementaux
- Trop d’acteurs financiers s’autorisent encore à soutenir les projets gaziers en Arctique malgré l’impact désastreux des émissions de méthane pour le climat, dénoncé par les climatologues du Giec. Même l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) rappelle qu’il faut réduire la production de gaz pour limiter le réchauffement à moins de 1,5°C.
Cliquez ici pour accéder à notre carte interactive qui vous permettra d’explorer les zones d’exclusion des acteurs financiers, et de comprendre en quoi ces zones ne permettent pas de stopper l’expansion pétro-gazière en Arctique.
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