Demain se tiendra l’Assemblée Générale de Natixis. L’occasion de faire le point sur la politique du groupe face au défi du siècle: limiter le réchauffement climatique à 1,5°C et sortir du charbon, du pétrole et du gaz. Jusqu’à maintenant, le groupe Natixis s’est inscrit en faux avec cet objectif : depuis 2016, la banque a augmenté ses soutiens à l’expansion des énergies fossiles et aux secteurs d’activité pétrole et gaz les plus risqués. Au lieu des réformettes, telle que celle opérée en avril 2021, le groupe compte-t-il revoir radicalement sa copie à l’aune de l’urgence climatique d’ici la COP 26 ?

Natixis soutient toujours l’expansion des énergies fossiles

Si la tendance indique que les soutiens de la banque Natixis aux énergies fossiles diminuent depuis deux ans – ce qu’on ne peut pas dire des autres banques françaises – Natixis a toutefois accru sur cette même période ses soutiens aux entreprises qui développent de nouveaux projets dans les énergies fossiles : les majors pétrolières et gazières. Loin d’être négligeable, il s’agit en vérité d’un énorme trou dans la raquette. Les majors pétrolières et gazières telles que Total, Shell et BP sont actives aux quatre coins du monde. Loin de se détourner des secteurs les plus risqués pour le climat, la biodiversité et les populations, elles sont toutes à l’avant-garde de l’expansion dans des secteurs comme le pétrole et gaz de schiste, les sables bitumineux et les forages en Arctique. Conclusion : Natixis a beau réduire ses soutiens globaux aux énergies fossiles, elle joue toujours le rôle de détonateur dans le développement des pires projets pétroliers et gaziers au monde. Notre Scan de la Finance Fossile montre que Natixis a mis les verrous nécessaires pour ne plus soutenir directement de nouveaux projets dans certains des secteurs les plus risqués, mais doit encore tout faire pour mettre un terme à ses soutiens aux (nombreuses) entreprises actives dans ces secteurs et qui contribuent à leur expansion.

Par ailleurs, Natixis est encore loin du compte au niveau même des projets de pétrole et gaz conventionnels. Alors que l’AIE a stipulé qu’on ne devait plus ouvrir de nouveaux projets pétro-gaziers et que plusieurs grosses banques françaises ont annoncé qu’elles ne financeraient pas le méga-projet pétrolier EACOP de Total en Afrique de l’Est, Natixis, elle, fait le dos rond.

Natixis, toujours enlisée dans le pétrole et le gaz de schiste

Fin 2020, Natixis annonçait une sortie complète du pétrole et du gaz de schiste, une annonce bienvenue étant donné que le groupe reste lourdement enlisé dans ce secteur particulièrement nocif pour le climat. Malheureusement, les mesures prises restent insuffisantes pour réellement enclencher une sortie.

  • Natixis ne finance plus de projets d’exploration et de production de gaz et pétrole de schiste mais peut toujours financer les infrastructures de transport comme les terminaux d’exportation de gaz de schiste sous forme liquéfiée. Or, ces infrastructures permettront d’augmenter massivement la production de gaz de schiste. Natixis est en retard sur les banques françaises: même Société Générale, qui a pourtant une politique cosmétique sur le secteur, fait mieux en s’engageant à ne plus financer de nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié aux Etats-Unis.
  • Natixis a fixé un seuil d’exclusion fixé à 25% qui ne permet pas non plus d’exclure ni les entreprises très diversifiées (comme les majors pétrolières et gazières) ni les développeurs de nouveaux projets dans le pétrole et gaz de schiste. Or, en 2020, Natixis était, de très loin, le premier investisseur français, avec 4,4 milliards de dollars d’investissements détenus dans les 75 entreprises qui prévoient la plus forte production dans le secteur d’ici 2050. Il est urgent que Natixis s’engage à ne plus soutenir les entreprises qui contribuent à l’expansion du pétrole et gaz de schiste.

Les filiales investissement aux abonnés absents

Si la banque et Natixis Assurances ont adopté des politiques charbon, pétrole et gaz, plusieurs filiales de Natixis Investment Managers (NIM) ne semblent pas avoir lu les récents rapports scientifiques. Tous indiquent que pour limiter le réchauffement à 1,5°C et atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, il faut dès maintenant réduire la production de charbon, pétrole et gaz. A l’exception d’Ostrum qui fait partie des meilleurs élèves de la place financière de Paris, les autres filiales de NIM – DNCA, Loomis et Ossiam – n’ont toujours pas adopté de politique pour réduire leur addiction aux énergies fossiles, presque six ans après l’Accord de Paris sur le Climat.

Heureusement, il reste encore cinq mois à Natixis pour rectifier le tir d’ici la COP 26 à Glasgow, en annonçant et en engageant une sortie progressive des énergies fossiles, sur l’ensemble de ses activités.