Refonte du Label ISR : une majorité de Français s’oppose au greenwashing

Paris, le 12 octobre – 6 Français sur 10 estiment qu’un fonds labellisé “responsable” ne devrait pas investir dans des entreprises développant de nouveaux projets de charbon, pétrole et gaz. C’est le résultat d’un nouveau sondage Opinion Way pour Reclaim Finance publié dans le média Novethic. Un sondage qui intervient alors que Bercy doit statuer prochainement sur la réforme du label ISR (Investissement socialement responsable), avec le risque de revenir sur un critère-clé qui doit exclure les grandes entreprises pétro-gazières. Reclaim Finance appelle Bruno Le Maire à entendre l’avis des Français en donnant au label ISR la crédibilité qui lui manque.

D’après le sondage Opinion Way pour Reclaim Finance, 6 Français sur 10 pensent qu’un placement “responsable” ne devrait pas investir dans les entreprises développant des projets d’énergies fossiles. De même, 64% des sondés pensent que des fonds “responsables” comprenant de telles entreprises relèvent du greenwashing.

Il existe un consensus clair sur le fait qu’un placement ne peut pas être jugé “responsable” s’il investit dans des entreprises comme TotalEnergies qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers. Si Bruno Le Maire veut rendre le Label ISR crédible et mobiliser l’épargne en faveur de la transition, il doit entendre l’opinion plutôt que d’institutionnaliser le greenwashing.

Antoine Laurent, Responsable Plaidoyer France chez Reclaim Finance

Deux ans après avoir lancé la réforme du label ISR [1], critiqué pour son manque de “crédibilité et de pertinence” [2] du fait notamment de la présence dans les fonds labellisés d’entreprises pétro-gazières [3], Bruno Le Maire est appelé à arbitrer dans les prochains jours à partir des propositions transmises par le Comité du label en juillet dernier [4]. Parmi celles-ci, l’une des plus emblématiques est dans le viseur des lobbys du secteur financier : l’exclusion des entreprises développant de nouveaux projets de pétrole et de gaz dits non conventionnels ou dont la production de pétrole et de gaz non conventionnels représente plus de 5 % de la production totale d’hydrocarbures. Ce critère reviendrait à exclure des entreprises telles que TotalEnergies des fonds labellisés ISR.

Ce niveau d’exigence minimum, qu’a d’ailleurs dépassé le label belge Towards Sustainability qui a décidé d’exclure tous les développeurs de nouveaux projets fossiles [5], est impératif pour le label ISR : en effet, il permettrait d’exclure de fait les entreprises qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers et donc de cesser d’être en contradiction avec les objectifs de limitation à 1,5°C du réchauffement planétaire [6].

La crainte qu’une révision trop contraignante réduise le nombre de fonds labellisés est à relativiser dans la mesure où près de 800 milliards d’euros d’encours sont déjà concernés par ce label. La priorité doit avant tout être que le label gagne en crédibilité et de réduire l’impact négatif des investissements “responsables” qu’il est censé attirer.

La crédibilité du label ISR pénalisée par la présence d’entreprises pétro-gazières

Du fait de son faible niveau d’exigence, les fonds labellisés ISR investissent fortement dans plusieurs secteurs controversés, notamment celui de la production d’énergies fossiles. Cette lacune n’encourage pas les épargnants à y souscrire au nom de l’investissement responsable et est l’une des principales raisons qui a poussé à une refonte du label.

Selon un nouveau sondage exclusif commandé par Reclaim Finance (OpinionWay, septembre 2023) :

  • 60 % des Français considèrent qu’un placement dit “responsable” ne devrait pas investir dans des entreprises qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers
    • Ce chiffre monte à 73 % pour les plus âgés (> 65 ans), 69 % pour les plus aisés (> 3 500 €/mois)
    • Ce chiffre reste supérieur à 57 % quelle que soit la proximité partisane, 70 % pour les proches des Républicains et 61 % pour les proches de la majorité présidentielle.
  • 64 % des Français considèrent qu’un placement dit “responsable” qui investit dans dans des entreprises qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers relève du greenwashing
    • Ce chiffre monte à 72 % pour les jeunes (25-34 ans), 72 % pour les plus aisés (> 3 500 €/mois)
    • Ce chiffre reste supérieur à 52 % quelle que soit la proximité partisane, 68 % pour les proches de la majorité présidentielle.

Selon une analyse menée par Rift et Reclaim Finance sur 735 fonds labellisés ISR, soit 54 % des fonds certifiés par l’État (septembre 2023) :

  • 43 % investissent dans au moins une entreprise dans les secteurs du charbon, du pétrole ou du gaz (upstream et midstream)
  • 31 % investissent dans au moins une entreprises opérant le secteur de l’exploration et la production de pétrole ou de gaz (upstream)
    • Ce chiffre tomberait à 3 % si le label venait à exclure les entreprises qui développent de nouveaux champs d’hydrocarbures non-conventionnels
    • Si l’on considère seul le seuil d’exclusion de 5 % sur la production d’énergies non-conventionnelles (sans l’exclusion mentionnée ci-dessus sur le développement de nouveaux champs d’hydrocarbures non-conventionnels), le pourcentage de fonds accepté dans le label serait de 13 %.
    • En revanche, ce chiffre resterait quasi-inchangé si la définition retenue d’un hydrocarbure non-conventionnel ne comprenait pas le forage en eau-profonde, l’Arctique et la fracturation hydraulique.
    • Il est donc fondamental de garder la définition du développement, de l’exploration et de la production d’énergies non-conventionnelles avec l’ensemble de ces catégories et surtout le forage en eau-profonde, l’Arctique et la fracturation hydraulique.

Selon un sondage commandé par le Forum pour l’investissement responsable (FIR) (Ifop, août 2023) :

  • plus de 80 % des épargnants considèrent que les activités liées au pétrole ou au charbon ne sont pas compatibles avec un investissement responsable.
  • 76 % estiment que les fonds “responsables” constituent surtout un argument marketing sur lequel les banques communiqueront mais qui ne changera rien à l’utilisation concrète qui sera faite de votre épargne
  • 57 % estiment qu’un investissement responsable devrait exclure certains secteurs d’activité

Selon un sondage commandé par l’AMF (Opinion Way, Juillet 2023) :

  • Seuls 19 % des Français ont confiance dans le label ISR
  • 36 % jugent la crainte du greenwashing comme frein à l’investissement responsable

Selon une étude menée par Epsor en 2022 sur un échantillon de 814 fonds actions :

  • 53 % des entreprises dans lesquelles les fonds sont investis sont communes aux fonds labellisés et aux fonds non labellisés.Pour exemple, TotalEnergies apparaît dans 19 % des fonds ISR (contre 20 % des fonds non-labellisés)
  • 80 % des fonds ISR sont présents dans au moins une société en lien avec les énergies fossiles

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2023-10-16T09:38:24+02:00