Paris, le 23 novembre 2023 – Les acteurs financiers continuent de financer le très polluant charbon métallurgique, utilisé pour produire de l’acier, malgré l’existence d’alternatives moins émettrices. Alors que la sortie du charbon sera un des sujets de la COP28 à Dubai, le nouveau rapport de Reclaim Finance (1) pointe du doigt l’absence d’engagements sur le charbon métallurgique des acteurs financiers, pourtant indispensables pour y parvenir. Une absence de politiques alors même que des engagements sur le charbon thermique, utilisé pour produire de la chaleur/électricité, existent. Depuis 2016, les plus grandes banques mondiales, notamment françaises, ont ainsi versé US$557 milliards aux 50 plus grands développeurs du secteur du charbon métallurgique. De leur côté, les investisseurs ont investi plus de US$163 milliards dans ces entreprises. Reclaim Finance appelle les acteurs financiers à adopter de toute urgence des politiques sur le charbon métallurgique.
Élément incontournable de la production de voitures, d’appareils ménagers ou dans la construction d’infrastructures de la transition énergétique telles que les éoliennes, l’industrie de l’acier est le plus grand émetteur industriel de CO2. A cause de l’utilisation du charbon métallurgique dans sa production, l’acier est responsable de 11 % des émissions mondiales (2), devant les 2,1% du secteur de l’aviation (3). Une utilisation qui n’est pas prête de s’arrêter : 138 projets de nouvelles mines ou d’extensions de mines existantes destinées à produire du charbon métallurgique sont actuellement prévus dans le monde (4).
Mais alors que l’Agence internationale de l’énergie indique que la production à partir de mines existantes est suffisante pour répondre à la demande pour la production d’acier (5), Reclaim Finance révèle que les grandes banques mondiales et investisseurs continuent de financer les entreprises développant de nouveaux projets de charbon métallurgique (6). Parmi elles, l’entreprise anglo-suisse Glencore qui vient de racheter 77% des activités de charbon métallurgique du groupe canadien Teck Resources (7), ou encore les entreprises BHP Mitsubishi Alliance et Whitehaven Coal.
Ainsi, entre janvier 2016 et juin 2023, les banques ont fourni plus de US$557 milliards aux 50 entreprises qui développent le plus de charbon métallurgique. Parmi elles se trouvent la banque japonaise Mitsubishi UFJ Financial, les banques américaines Citigroup ou Bank of America, mais également les banques françaises. Dans le classement des banques ayant le plus soutenu les 50 plus grandes entreprises du secteur – hors entreprises chinoises :
- BNP Paribas est la 11e banque avec US$4,5 milliards (8).
- Crédit Agricole arrive à la 20e place avec US$3,7 milliards et Société Générale à la 22e avec US$3,5 milliards de financements apportés (9).
- Le groupe BPCE/Natixis est lui en 42e position avec US$1,6 milliards (10).
De leur côté, les investisseurs ont investi US$163 milliards dans les plus grandes entreprises développant des nouveaux projets de charbon métallurgique, d’après les données de juin 2023. Les américains BlackRock et Vanguard arrivent en tête – le groupe français BPCE est lui à la 43e place avec US$782 millions d’investis.
Les solutions pour décarboner l’acier existent et la transition vers de nouvelles technologies est en cours. Et pourtant, les acteurs financiers continuent de jeter de l’huile sur le feu, en soutenant financièrement le développement de nouvelles mines. Continuer de financer de nouvelles mines est une aberration économique, car elles risquent de devenir des actifs échoués, et climatique. Les acteurs financiers doivent adopter des politiques pour mettre fin à l’expansion du charbon métallurgique.
Cynthia Rocamora, chargée de campagne Industrie chez Reclaim Finance
Utiliser du charbon métallurgique pour fabriquer de l’acier est désastreux pour le climat : cela émet 2,3 tonnes de CO2 pour chaque tonne d’acier liquide. Il est temps d’abandonner la production d’acier à base de charbon, et ce avec le soutien des acteurs financiers. Les investissements dans de nouvelles usines sidérurgiques alimentées au charbon risquent de devenir des actifs abandonnés.
Caroline Ashley, directrice de SteelWatch
Si un nombre grandissant de banques ont adopté une politique d’exclusion du charbon thermique, presque aucune ne concerne le charbon métallurgique. Seules cinq des cinquante banques analysées – la Société Générale, BNP Paribas (11), HSBC, Westpac et Caixa Bank – ont adopté des engagements contre le financement des projets de mines de charbon métallurgique. Cependant, ces mêmes politiques ne leur empêchent en aucun cas de soutenir l’expansion du secteur puisque les financements aux entreprises qui développent de nouveaux projets sont toujours autorisés (12).
Le retard des politiques est encore plus grand du côté des investisseurs : aucun d’entre eux n’a adopté des mesures d’exclusion sur le charbon métallurgique et seulement 20% d’entre eux ont pris des mesures sur le charbon thermique.
Reclaim Finance appelle donc tous les acteurs financiers à mettre fin aux financements de nouveaux projets de charbon métallurgique et à ne plus soutenir les entreprises qui développent ces nouveaux projets.