Lloyd’s of London : le marché de l’assurance de l’expansion des énergies fossiles

Paris, 09.10.2024 – Lloyd’s of London, premier marché mondial de l’assurance, freine l’action climatique de l’industrie de la (ré)assurance en soutenant l’expansion des énergies fossiles : c’est ce que révèle une nouvelle analyse de Reclaim Finance (1). Alors que d’autres grands assureurs européens ne couvrent plus les nouveaux projets liés aux énergies fossiles, Lloyd’s of London continue de le faire, sans exiger de ses membres, les managing agents, l’adoption de mesures pour ne plus couvrir l’expansion des énergies fossiles. Seuls 5 des 51 managing agents de Lloyd’s ont un engagement limitant leur couverture des nouveaux projets de charbon et des nouveaux champs pétroliers et gaziers (2). Reclaim Finance les appelle à prendre leurs responsabilités et à mettre en place des politiques solides et appelle Lloyd’s of London à utiliser son pouvoir de régulateur sur son propre marché.

Si Llyod’s of London s’est positionné comme le marché de l’assurance pour la transition (3), une nouvelle analyse révèle la défaillance criante de son leadership en la matière. Lloyd’s of London n’exige toujours pas de ses membres, appelés managing agents (responsables des syndicats qui composent le marché), qu’ils aient des politiques en place pour arrêter leur soutien au développement de nouveaux projets de charbon, de pétrole et de gaz (4) – des politiques pourtant essentielles pour la transition et cruciales pour atteindre l’engagement net zéro de Lloyd’s of London (5).

Reclaim Finance a analysé les politiques des 51 managing agents du marché de Lloyd’s et a constaté que 46 d’entre eux, représentant 93 % du marché, n’ont aucune politique en place pour restreindre la couverture des nouveaux champs pétroliers et gaziers (6).

Dix-huit managing agents sont considérés comme « lents », notamment Beazley Furlonge, Hiscox Syndicates, MS Amlin Underwriting et Tokio Marine Kiln Syndicates, car ils se sont engagés à ne plus souscrire de risques liés aux nouvelles mines ou centrales charbon, mais pas à ne plus souscrire de risques liés aux nouveaux champs pétroliers et gaziers.

Vingt-huit sont considérés comme des « grands retardataires » parce qu’ils n’ont aucune politique en matière d’expansion des énergies fossiles : c’est le cas par exemple de Chaucer Syndicates.

Lloyd’s of London aime à se présenter comme le champion de la transition, mais en réalité, le marché permet à l’industrie fossile de poursuivre son expansion. Le marché de Lloyd‘s a le pouvoir et la responsabilité de contrôler son propre marché, mais il a choisi de ne pas le faire, laissant à ses managing agents le champ libre pour transformer sa promesse de neutralité carbone en une coquille vide. Conséquence : c’est devenu l’assureur de choix pour l’expansion des énergies fossiles. Si le marché de Lloyd’s veut être pris au sérieux en tant qu’acteur principal de la transition, ses managing agents doivent adopter des politiques dès maintenant.

Ariel le Bourdonnec, chargé de campagne assurance et réassurance chez Reclaim Finance

En l’absence de tout engagement d’arrêt de leur soutien à l’expansion fossile, les managing agents de Lloyd’s continuent de couvrir les risques liés aux nouveaux projets d’énergies fossiles. Ils fournissent d’ores et déjà une couverture pour certains des plus grands projets d’énergies fossiles au monde, y compris dans des régions à haut risque du changement climatique comme en Arctique (7).

Reclaim Finance exhorte les managing agents de Lloyd’s of London à cesser d’alimenter les risques climatiques et à adopter des politiques ambitieuses pour lutter contre l’expansion fossile, alignées sur la promesse de neutralité carbone de Lloyd’s of London (8). Cela passe notamment par ne plus fournir de couverture de (ré)assurance pour les risques liés à de nouveaux projets de charbon, de nouveaux projets pétroliers et gaziers ou de nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié.

L’ONG demande à Lloyd’s of London d’utiliser son pouvoir de régulateur sur son propre marché pour définir une politique claire et contraignante sur la question de l’expansion fossile pour tous ses managing agents.

Contacts :

Notes :

  1. Reclaim Finance, For a few dollars more – the Fossil Fuel Policies of Lloyd’s Managing Agents (2), octobre 2024.
  2. Les cinq managing agents sont identifiés comme précurseurs parce qu’ils se sont engagés à cesser de souscrire des risques liés aux nouvelles mines de charbon, aux nouvelles centrales à charbon, mais aussi aux nouveaux champs pétroliers et gaziers (conventionnels et non conventionnels). Ils sont Argenta Syndicate Management, AXA XL Underwriting Agencies, Munich Re Syndicate, Probitas Managing Agency et SCOR Managing Agency. Voir le graphique ici.
  3. Insuring the Transition, Lloyd’s of London, juillet 2024.
  4. Lloyd’s of London a été mandaté par la Prudential Regulation Authority (PRA) pour réglementer son propre marché, y compris le niveau et le type de risques souscrits sur son marché.
  5. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) indique dans son scénario Net Zero Emissions by 2050 l’arrêt de tout nouveau projet de charbon, de pétrole ou de gaz pour atteindre la neutralité carbone en 2050 en limitant le réchauffement à 1,5°C. Cela inclut les nouveaux terminaux d’exportation de GNL. Selon l’analyse de Reclaim Finance, aucun managing agent ne s’est encore engagé à ne pas assurer les risques liés aux nouveaux terminaux d’exportation de GNL.
  6. Les 46 managing agents qui n’ont pas de politique sur l’expansion du pétrole et du gaz sont Beazley Furlonge, Hiscox Syndicates, MS Amlin Underwriting et Tokio Marine Kiln Syndicate.
  7. Par exemple, Beazley Furlonge et Brit Syndicates ont signé un contrat avec l’entreprise pétrolière nationale polonaise, Polskie Górnictwo Naftowe i Gazownictwo SA (PGNiG), bien que leurs politiques limitent la souscription de risques liés au pétrole et au gaz dans la région Arctique, qui représente 30 % de la production de pétrole et de gaz de PGNiG.
    Talbot Underwriting a assuré le deuxième plus grand terminal d’exportation de GNL des États-Unis, Freeport LNG, entre 2022 et 2023. Ce terminal est connu pour avoir violé à plusieurs reprises les règles de l’État du Texas en matière de pollution de l’air entre 2019 et 2021.
  8. Lucie Pinson, directrice de Reclaim Finance, a écrit aux managing agents de Lloyd’s of London en avril 2024 pour leur demander d’adopter des politiques, une lettre restée sans réponse – voir ici.

Lire aussi

2024-11-27T14:02:38+01:00