Barclays vient d’adopter de nouvelles restrictions sur ses services financiers aux énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole). Clairement, la banque n’a pris la mesure ni des enjeux climatiques, ni des critiques et pressions auxquelles elle s’expose à l’approche de la prochaine COP qui se tiendra à Glasgow.

Cette annonce vient après la publication par Reclaim Finance, Rainforest Action Network, BankTrack, Indigenous Environmental Network, Oil Change International et Sierra Club d’un rapport démontrant que Barclays est, avec 118 milliards de financements aux énergies fossiles entre 2016 et 2019 le plus gros financeur européen et 7ème au niveau international du chaos climatique.

Sur le charbon:

  • Comme Standard Chartered, Barclays repousse à plus tard l’adoption de seuils d’exclusion stricts, se contentant d’exclure dès maintenant les entreprises minières et de production d’électricité tirant plus de 50% de leurs revenus du charbon. Si le principe de baisser ce seuil dans le temps est le bon, il faudra attendre 2025, dans 5 ans, pour voir ce pourcentage passé à 30%, puis 2030 pour le voir à 10%. Crédit Mutuel applique d’ores et déjà un seuil d’exclusion de 20%, et Natixis 25%, en utilisant les bonnes métriques (voir point plus bas). Mais c’est la banque britannique RBS qui va le plus loin dans ce domaine en ayant adopté le mois dernier un seuil d’exclusion de 15% dès 2022, également avec les bonnes métriques.
  • Comme Standard Chartered, Barclays se trompe de métrique et calcule l’exposition des entreprises productrices d’électricité au charbon à partir de la part du charbon dans leurs revenus et non dans leur électricité produite. D’après la Global Coal Exit List, Barclays peut donc continuer de financer au moins 30 entreprises qui produisent plus de 50% de leur électricité à partir du charbon mais en tirent moins de 50% de leurs revenus.
  • De plus, contrairement à d’autres banques, notamment françaises, Barclays ne s’engage pas sur des dates de sortie définitive du charbon et ne conditionne pas ses soutiens à l’adoption par ses clients d’un plan de retrait du charbon. Au contraire, Barclays peut toujours financer les plus de 200 entreprises qui tirent moins de 50% de leurs revenus du charbon mais prévoient ensemble 6 fois plus que la capacité installée en Allemagne. La banque britannique a déjà financé 12 développeurs de nouvelles centrales à charbon à hauteur de 7,5 milliards de dollars entre 2017 et septembre 2019, et seules Eskom et NTPC sont désormais exclues avec certitude par cette nouvelle politique.

Sur le gaz et le pétrole:

  • Barclays se contente de demander aux entreprises actives dans les sables bitumineux des efforts de réduction de l’intensité carbone de leur production pétrolière et applique, ce qui est bien insuffisant quand on sait les risques sociaux, environnementaux et climatiques liés à ce secteur. Barclays est pourtant le septième financeur mondial de ce secteur avec 3,2 milliards de dollars octroyés entre 2016 et 2019.
  • En Europe et au Royaume-Uni, la banque exclut désormais les projets ayant recours à la fracturation hydraulique ainsi que les entreprises principalement actives dans ce secteur, mais aucune exclusion n’est adoptée pour les autres pays comme les Etats-Unis ou l’Argentine où se situe la quasi totalité des nouveaux projets. Barclays est pourtant le 5ème plus gros financeur de ce secteur avec plus de 17 milliards de dollars octroyés entre 2016 et 2019.
  • La seule avancée sur le gaz et le pétrole est sur l’Arctique où Barclays exclut le financement direct à de nouveaux pétroliers et gaziers en Arctique et une exclusion des entreprises qui tirent plus de 50% de leurs revenus de ce secteur. Mais il n’est pas certain que cela soit suffisant pour réduire drastiquement les financements à la banque dans ce secteur qui ont beaucoup augmenté en 2019 par rapport aux années précédentes, avec 1,1 milliard octroyé entre 2016 et 2019 et une sixième place mondiale.

La banque anglaise est donc loin de s’engager sur une trajectoire alignée avec les objectifs de l’Accord de Paris. Cela impliquerait de ne plus soutenir le développement des énergies fossiles mais au contraire d’en soutenir leur sortie.

L’écart entre les mesures annoncées aujourd’hui avec les transformations à opérer pour limiter le réchauffement à 1,5°C démontre ainsi la vacuité de l’ambition annoncée de la banque à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Si celle-ci ne constitue qu’une ambition et non un objectif opposable, il est certain que le tenir implique une sortie du gaz et du pétrole au plus tard d’ici 2040 dans les pays de l’UE et de l’OCDE et d’ici 2050 au niveau international, et dix ans plus tôt pour le charbon.

Reclaim Finance appelle donc les actionnaires de la banque à exiger de Barclays une véritable sortie des énergies fossiles.

Voir la politique de Barclays.