Coutts, la branche de banque privée de Natwest (ex Royal Bank of Scotland), qui se trouve être aussi la banque de la Reine d’Angleterre, a annoncé le 24 juin dernier dans son dernier rapport sur le développement durable qu’elle arrêtait d”investir dans les entreprises les plus exposées aux secteurs du charbon, des sables bitumineux et de l’Arctique. Coutts n’est pas une banque de financement et d’investissement et n’émet donc pas de prêts ni d’actions ou d’obligations pour les entreprises. Elle gère en revanche plus de 34 milliards de livres sterling d’actifs pour le compte de ses riches clients.

Sur le charbon:

  • Concrètement, concernant le charbon, la banque exclut les investissements dans les entreprises minières tirant plus de 5% de leurs revenus du charbon thermique, et dans les entreprises tirant plus de 25% de leur revenus de la production d’électricité à base de charbon. Ce dernier critère n’utilise pas l’indicateur le plus pertinent qui reste la part de la production d’électricité à partir du charbon dans la production totale, plus à même de refléter l’impact sur le climat de cette activité. Si ces critères d’exclusion sont tout de même assez stricts, ils ne suffisent pas à sortir du secteur du charbon à eux seuls.
  • Il manque en effet une exclusion totale de tous les développeurs de charbon, dont certains sont sous les seuils d’exclusion de 5% et 25%, notamment pour les entreprises les plus diversifiées. C’est le cas pour 18 entreprises minières qui prévoient toujours de nouvelles mines de charbon, et pour 61 entreprises qui prévoient la construction de plus de 110 GW de centrales à charbon, soit l’équivalent des flottes charbon de l’Allemagne, du Japon et de la Turquie réunies.
  • Il manque aussi une stratégie de sortie globale du secteur d’ici 2030 dans l’Union Européenne et l’OCDE, et 2040 dans le reste du monde, pour s’aligner avec les objectifs de l’Accord de Paris. Et envoyer un signal clair à toutes les entreprises restantes en portefeuille en leur demandant d’adopter un plan de fermeture de leurs actifs charbon d’ici les mêmes dates.
  • Le périmètre d’application de la politique est aussi problématique car elle ne s’applique qu’aux investissements directement réalisés par Coutts, et pas à ceux confiés à des gestionnaires d’actifs externes, ce qui en limite la portée.

Sur le pétrole et le gaz:

  • Concernant les sables bitumineux, la banque exclut les entreprises tirant plus de 5% de leurs revenus de ce secteur d’activité, ce qui en fait un critère d’exclusion strict allant bien au-delà de ceux habituellement pratiqués dans ce domaine.
  • La banque dit aussi exclure les entreprises qui tirent plus de 5% de leurs revenus de l’exploration de pétrole et de gaz en Arctique offshore. Si le seuil de 5% est bas, l’impact de la politique pourrait être très faible si elle ne concerne bien que l’exploration et non pas la production d’hydrocarbures en Arctique, seule à-même de produire des revenus. Cependant, Coutts précise dans son dernier rapport TCFD : “nous n’investirons pas dans une entreprise qui tire plus de 5 % de ses revenus de l’exploration pétrolière et gazière dans l’Arctique. Cette situation est évaluée en fonction du fait qu’une entreprise détient ou non au moins une licence ou un permis de forage ou d’exploration dans la région offshore de l’Arctique. Sustainalytics fournit des informations binaires (oui ou non) pour cette catégorie”. La deuxième partie de la phrase laisse entendre qu’il pourrait bien s’agir de la part des revenus générés à partir de la production d’hydrocarbures en Arctique. Si cela est confirmé par la banque, la politique pourrait donc être une des plus exigeantes malgré l’absence d’application aux activités en Arctique onshore.

Coutts a donc adopté une première politique fossile intéressante mais il lui reste encore du chemin à faire pour s’aligner avec les objectifs climatiques de l’Accord de Paris.