Berlin, Paris, le jeudi 7 octobre – L’ONG allemande Urgewald vient de publier une mise à jour de la Global Coal Exit List, la base de données publique la plus complète au monde sur l’industrie du charbon, déjà utilisée par des centaines d’institutions financières dont de nombreuses françaises. Le verdict est alarmant : près de la moitié des entreprises listées prévoient toujours de nouveaux projets de mines, centrales ou infrastructures charbon et seulement 49 ont des dates de sortie. Alors qu’un nombre important d’acteurs financiers français demandent à leurs clients d’adopter un plan de sortie du charbon, Reclaim Finance et Urgewald leur ont partagé une liste de 10 critères à prendre en compte pour évaluer la qualité de ces plans.

La Global Coal Exit List (GCEL) 2021 publiée par Urgewald et 40 autres organisations dont Reclaim Finance (1) fournit des données détaillées sur 1030 entreprises et environ 1800 filiales opérant le long de la chaîne de valeur du charbon thermique. 503 entreprises (soit 49 %) prévoient toujours de développer de nouvelles centrales électriques au charbon, de nouvelles mines de charbon ou de nouvelles infrastructures de transport du charbon. S’ils étaient réalisés, ces projets augmenteraient la capacité de production d’électricité au charbon de 23 % (soit plus de 4 fois la capacité installée dans l’Union Européenne (2)) et la production de charbon thermique de 27 % dans le monde. Tous sont incompatibles avec le budget carbone restant pour limiter le réchauffement à 1,5°C et la surdité de ces 503 entreprises aux appels répétés depuis 2015 par les Nations Unies (3) et l’Agence Internationale de l’Énergie (4) pour un arrêt de l’expansion du charbon démontrent leur intention de ne pas transitionner.

“Tant que les investisseurs, les banques et les assureurs continueront à soutenir les entreprises listées dans la GCEL, il sera impossible de sortir du charbon à temps. De nombreuses institutions financières justifient le maintien de leur soutien à l’industrie du charbon en affirmant qu’elles veulent aider leurs clients à effectuer la transition. Mais nos recherches montrent que la grande majorité des entreprises de la GCEL ne sont pas en transition » déclare Heffa Schuecking, directrice d’Urgewald.

Seules 49 entreprises listées sur la GCEL (soit 5%) ont annoncé une date de sortie du charbon. Et dans un tiers de ces cas, leurs dates arrivent après les échéances scientifiques de sortie du charbon au plus tard d’ici 2030 pour les pays européens et de l’OCDE et d’ici 2040 pour les autres pays (5). C’est le cas des conglomérats japonais Marubeni et Sumitomo, qui non seulement prévoient de sortir du charbon vers la fin des années 40 ou en 2050 mais sont toujours impliqués dans la construction de nouvelles centrales au charbon. De plus, se doter de la bonne date de sortie ne suffit pas pour garantir une sortie du charbon répondant aux exigences climatiques et de transition juste.

« C’est une décennie décisive pour le climat et nous en paierons tous le prix si les institutions financières ne renvoient pas rapidement le financement et l’investissement dans le charbon aux livres d’histoire. Au-delà de couper tous soutiens aux expansionnistes du charbon, toute institution financière un brin sérieuse sur le climat doit conditionner ses soutiens à l’adoption par ses clients d’un plan détaillé de fermeture de tous ses actifs charbon et doit exiger que cette sortie soit un tremplin vers une production d’électricité totalement décarbonée” déclare Lucie Pinson, directrice de Reclaim Finance.

D’après l’AIE, atteindre l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050 requiert de décarboner complètement le secteur de la production d’électricité dans les économies dites avancées d’ici 2035 et dans le reste du monde d’ici 2040 (6). Or de nombreuses entreprises ont recours à la vente d’actifs (par exemple, BHP, Anglo American, Glencore) ou décident de les convertir au gaz ou à la biomasse (Engie), quand elles ne bloquent pas purement la transition en intentant des procès contre les fermetures de centrales au charbon (RWE, Fortum/Uniper).

“Sortir du charbon est un exercice périlleux et on s’attend à ce que de nombreux acteurs financiers se satisfassent de l’adoption par leurs clients d’une date finale de sortie et n’exigent pas la mise en place d’un plan de transition juste et le déploiement d’une alternative énergétique décarbonée et durable. Tout acteur qui souhaite sincèrement sortir du charbon en vue de tenir l’objectif d’atteinte de la neutralité carbone d’ici 2050 sur une trajectoire 1,5°C doit s’assurer que ses clients ferment et non vendent ou convertissent à la biomasse ou au gaz leurs centrales en opération”, déclare Paddy McCully, analyste senior énergétique chez Reclaim Finance.

39 acteurs financiers français se sont engagés à sortir du charbon dans les temps impartis pour limiter le réchauffement à 1,5°C mais seulement 25 appellent leurs clients à adopter des plans de sortie du charbon (7). Reclaim Finance et Urgewald publient un briefing pour aider les institutions financières à évaluer la robustesse de ces plans (8).

Contacts presse :

  • Lucie Pinson, fondatrice et directrice de Reclaim Finance, lucie@reclaimfinance.org, +33 6 79 54 37 15
  • Angus Satow, responsable des médias chez Reclaim Finance, angus@reclaimfinance.org, +447847754046

Notes :

  1. La Global Coal Exit List, actualisée chaque année, est accessible ici.
  2. La capacité en cours de développement est de 480 GW (source : la GCEL), soit plus de 4 fois la capacité installée de charbon dans l’Union Européenne qui était de 112 GW en 2020. Source : la Commission Européenne.
  3. Source : la déclaration du Secrétaire Général des Nations Unies, 9 août 2021.
  4. Retrouver le verbatim de Fatih Birol, directeur de l’AIE ici.
  5. Source: Climate Analytics, Coal Phase Out, 2019.
  6. Source : le scénario net zéro de l’Agence Internationale de l’Energie.
  7. Source : le Coal Policy Tool, outil d’évaluation des politiques charbon des acteurs financiers développé par Reclaim Finance.
  8. Lire le briefing de Reclaim Finance et Urgewald, How to exit Coal: 10 Criteria for Evaluating Corporate Coal Phase-Out Plans.

Pour aller plus loin :