Paris, le 22 mai 2023 – Reclaim Finance et Better Brazoria (1) ont mis la main sur l’un des contrats d’assurance couvrant Freeport LNG, deuxième plus grand terminal de gaz naturel liquéfié (GNL) des Etats-Unis, situé dans le Golfe du Mexique. Malgré leurs engagements climatiques, SCOR, AXA, Allianz ou encore Lloyd’s of London ont fourni US$ 400 millions de capacité d’assurance entre janvier 2022 et janvier 2023. Alors que l’entreprise prévoit d’étendre ce projet et de porter ses émissions annuelles à un niveau équivalent à un tiers des émissions françaises de CO2 (2), Reclaim Finance appelle les assureurs impliqués, notamment SCOR qui tiendra son assemblée générale ce jeudi, à s’engager à ne pas couvrir son expansion et tout autre nouveau projet de terminal de GNL.
Les deux ONG se sont procurées l’un des contrats d’assurance du terminal d’exportation de GNL Freeport LNG (3), qui prévoit de développer un 4ème train de production de GNL à partir de 2024. Initialement construit pour être un terminal d’importation de GNL, Freeport LNG a été transformé en terminal d’exportation à partir de 2014 pour bénéficier de l’approvisionnement en gaz de schiste américain. Ce gaz non-conventionnel est exploité grâce à la fracturation hydraulique, une technique interdite en France en raison de ses nombreux impacts environnementaux (4).
Je vis au Texas, à quelques kilomètres de Freeport LNG, où le gaz naturel liquéfié menace ma communauté. Le méthane que le terminal transforme est hautement explosif. Il y a moins d’un an, une explosion s’est produite à Freeport LNG ébranlant nos maisons et faisant l’effet d’un coup de tonnerre. Chaque jour, nous vivons dans la crainte de la pollution de l’air et de l’impact de ces installations sur notre santé. J’appelle SCOR et les autres assureurs à laisser tomber ce projet et son expansion. Le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Melanie Oldham, fondatrice de Better Brazoria Clean Air & Water à Freeport, Texas
Le terminal Freeport LNG émet aujourd’hui environ 75 MtCO2/an soit, à lui seul, 25% des émissions de CO2 de la France. Avec son nouveau train de production prévu, les émissions pourraient grimper à environ 100 MtCO2/an (5). Malgré son niveau d’émission et son projet d’extension, et en dépit de leurs engagements climatiques, SCOR, AXA (à travers sa filiale AXA XL), Allianz et de nombreux syndicats de Lloyd’s of London ont fourni une couverture “responsabilité civile maritime” (Marine General Liability)(6) à Freeport LNG entre janvier 2022 et janvier 2023 offrant une capacité d’assurance de US$400 millions
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a indiqué dans son World Energy Outlook 2022 que même la guerre en Ukraine ne pouvait “justifier une nouvelle vague d’infrastructures pétrolières ou gazières dans un monde qui veut atteindre la neutralité carbone en 2050” (7). Au sujet du GNL, l’AIE précise qu’il n’y a pas besoin de capacités supplémentaires de GNL au-delà de ce qui existe ou est en cours de construction pour satisfaire la demande européenne projetée dans son scénario Net-Zero Emissions by 2050 (NZE) en l’absence de gaz russe. Le développement de ces nouvelles infrastructures, à rebours des recommandations des experts et des scientifiques pour limiter le réchauffement à 1.5°C, continue d’aggraver l’impact environnemental, climatique et humain du gaz de schiste et du GNL.
Soyons clairs : l’expansion du gaz naturel liquéfié, aux Etats-Unis ou ailleurs, ne contribue en aucun cas à la transition. L’AIE est formelle, aucun nouveau terminal de GNL ou expansion de terminaux existants approuvés après 2022 n’est nécessaire dans son scénario de neutralité carbone à 2050. Il serait donc logique de voir SCOR et AXA, en lien avec leurs engagements de neutralité carbone, refuser de couvrir l’expansion de Freeport LNG qui devrait recevoir sa décision finale d’investissement en 2024.
Ariel Le Bourdonnec, chargé de campagne Assurance à Reclaim Finance
Ni AXA ni SCOR n’ont de politique limitant leur soutien à de nouveaux projets de GNL comme l’expansion de Freeport LNG (8). Si AXA s’est engagé à ne plus couvrir les entreprises fortement impliquées dans le pétrole et gaz de schiste (9), l’assureur continue pourtant d’assurer les terminaux de GNL dépendant du gaz de schiste américain comme Freeport LNG. SCOR n’a aucune politique prévenant son soutien à de nouveaux terminaux de GNL (10), y compris ceux, qui comme Freeport LNG, contribuent directement à l’ouverture de nouveaux champs de gaz de schiste.
Reclaim Finance sera à l’assemblée générale de SCOR ce jeudi 25 mai pour l’appeler à s’aligner avec les recommandations scientifiques quant à l’impérieuse nécessité de ne plus assurer de nouveaux champs de pétrole, de gaz et nouveaux terminaux de GNL (11).
