En prenant les devants sur le gaz, Société Générale revient de loin

Paris, le 18 septembre 2023 – La nouvelle direction de la Société Générale vient de présenter sa feuille de route stratégique, incluant des annonces importantes sur le secteur des énergies fossiles [1]. Après plusieurs années en queue de peloton, Société Générale devance Crédit Agricole et BNP Paribas sur le gaz notamment et se hisse parmi les banques françaises les plus avancées sur le plan climatique. Reclaim Finance appelle la Société Générale à confirmer son ambition en cessant de soutenir l’expansion pétro-gazière par des mesures visant les entreprises qui développent de nouveaux champs.

A l’occasion de la présentation du plan stratégique 2026, Slawomir Krupa, le nouveau directeur général de Société Générale, a annoncé de nouveaux engagements importants sur les énergies fossiles.

En traitant le gaz au même niveau que le pétrole, la Société Générale va plus loin que Crédit Agricole et BNP Paribas et prend le leadership climatique parmi les principales banques françaises.

Antoine Laurent, responsable plaidoyer France chez Reclaim Finance

Parmi les principales mesures à saluer, Société Générale met fin au financement des nouveaux champs pétroliers et gaziers ayant reçu une décision finale d’investissement après le 31 décembre 2021, s’alignant sur BNP Paribas et devançant Crédit Agricole, qui ne s’était engagé que sur les projets pétroliers. De fait, Société Générale reconnaît pour la première fois la nécessité de mettre fin à l’expansion pétro-gazière, comme le préconisent les scientifiques dans leurs scénarios visant à limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C.

Société Générale ne financera plus non plus les entreprises spécialisées dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz [2], tout en épargnant les entreprises principalement détenues par des Etats comme Saudi Aramco. Elle devance ainsi ses principaux concurrents puisque seule la BNP Paribas avait adopté une mesure similaire, mais seulement pour la production de pétrole.

De plus, Société Générale ne financera plus les nouvelles infrastructures “midstream” [3] lorsqu’elles sont associées à de nouveaux champs pétroliers ou gaziers, ou lorsqu’elles sont alimentées par du gaz de schiste ou issu de l’Arctique, pendant que Crédit Agricole et BNP Paribas se limitent à quelques hydrocarbures non-conventionnels [4]. Reclaim Finance appelle la Société Générale à faire preuve de cohérence en étendant cette règle à l’ensemble des projets “midstream”, comme s’y sont engagés La Banque Postale et Crédit Mutuel Alliance Fédérale [5].

Société Générale s’engage à ne pas financer certains projets de gaz naturel liquéfié comme le projet climaticide Papua LNG, soutenu par Crédit Agricole en tant que conseiller financier. La nouvelle direction doit maintenant aller plus loin pour répondre à l’urgence climatique en cessant de soutenir les entreprises comme TotalEnergies qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers.

Antoine Laurent, responsable plaidoyer France chez Reclaim Finance

Après avoir alloué près de 98 milliards de dollars aux énergies fossiles depuis l’Accord de Paris – dont 11 milliards en 2022 [6], Société Générale assume continuer de soutenir les entreprises qui développent de nouveaux champs d’hydrocarbures et de nouvelles infrastructures de transport. Une manière de soigner ses principaux clients, à commencer par TotalEnergies. [7]

Reclaim Finance appelle la Société Générale à :

  • exiger des entreprises la fin du développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers, l’allocation de la majorité de leurs investissements vers les énergies durables, et la baisse de la production d’hydrocarbures à horizon 2030. [8]
  • à être plus ambitieuse sur le financement de la transition énergétique en adoptant une cible 2030 de ratio de financement de 5:1 (cinq euros pour les énergies durables pour chaque euro aux énergies fossiles) [9]

Contacts :

Notes :

  1. Société Générale, Plan stratégique 2026 ; nouvelle Politique sectorielle pétrole et gaz, septembre 2023.
  2. BNP Paribas exclut le financement des infrastructures pétrolières et gazières « midstream » associées à des projets amont « greenfield » ou « brownfield » situés dans les régions arctique et amazonienne, ni à de nouveaux pipelines et terminaux d’exportation approvisionnés par plus de 10 % de GNL non conventionnel sur une période moyenne de 2 ans. De son côté, Crédit Agricole exclut les projets d’infrastructures principalement dédiés aux projets pétroliers et gaziers ayant un impact critique sur une zone couverte par la convention Ramsar ou situés sur un site de l’UNESCO ou correspondant aux critères de l’Alliance for Zero Extinction, de projets d’extraction de pétrole extra-lourd, de conversion de gaz ou de charbon en liquides pétroliers, situés dans la zone Arctic Monitoring and Assessment Programme (AMAP) pour les projets terrestres, situés dans au nord de la ligne Köppen pour les projets maritimes (zone où il fait moins de 10 °C en juillet), ou encore de pétrole et de gaz de schiste.
  3. L’exclusion des projets « midstream » de Société Générale vise les infrastructures pétrolières et gazières les pipelines, terminaux de stockage, de liquéfaction et d’exportation de pétrole, de gaz fossile et de GNL « dont la viabilité et l’existence dépendent en majorité du développement d’activités amont pétrolières et gazières Greenfields ». De facto, cette règle d’exclusion ne concerne pas les nouveaux projets « mistream » associés à des champs déjà en exploitation et dont la production pourrait augmenter (dit « brownfield »), ni les infrastructures de gazéification destinées à l’importation de GNL notamment.
  4. Les entreprises spécialisées sont définies par Société Générale comme « les entreprises qui tirent la quasi-totalité de leurs revenus des activités Pétrole et Gaz amont ». Cette définition vague ne permet pas de savoir précisément quelles entreprises seraient concernées par la mesure d’exclusion, en fonction de quel critère en termes de production ou de chiffre d’affaire.
  5. Société Générale s’aligne sur les engagements de ses pairs européens HSBC et ING qui ont également arrêté tout soutien direct à certaines infrastructures « midstream », sans toutefois atteindre l’ambition des meilleurs élèves français comme la Banque Postale et le Crédit Mutuel, qui s’interdisent aussi de financer les projets qui ne sont pas associés à de nouveaux champs, ainsi que les infrastructure d’importation de LNG. Pour plus de détails, voir l’Oil & Gas Policy Tracker.
  6. Banking on Climate Chaos, mars 2023
  7. Société Générale est la 3ème banque ayant le plus soutenu TotalEnergies entre 2016 et 2022 après Crédit Agricole et BNP Paribas.
  8. Concernant le financement de la transition énergétique et les autres secteurs carbonés comme l’acier ou la production d’électricité, Société Générale ne prend aucun nouvel engagement malgré les lacunes de sa politique actuelle. Voir : Reclaim Finance, Décarboner le secteur de l’acier, Mars 2023 / Reclaim Finance, Le financement de la production d’électricité à partir de gaz fossile égare la transition énergétique de l’Europe, Avril 2023.
  9. A part la création d’un fonds d’un milliard d’euros aux objectifs flous, la nouvelle direction n’affiche aucune ambition nouvelle en matière de financement de la transition énergétique malgré les lacunes de ses engagements actuels.

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2023-10-06T12:14:06+02:00