Generali : nouvelle avancée dans la lutte contre l’expansion pétrolière et gazière

Paris, le 22 octobre 2024 – L’assureur italien Generali a annoncé ce mardi qu’il n’assurera plus les risques liés à l’expansion du pétrole et du gaz, y compris les nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL) et les centrales électriques au gaz (1). Cette annonce marque une avancée majeure dans la lutte contre l’expansion pétro-gazière, Generali étant le premier assureur au monde à adopter une politique couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur du pétrole et du gaz. Cependant, elle ne s’applique qu’aux entreprises considérées comme « retardataires de la transition » (2). Malgré les limites de cette politique, la coalition Insure Our Future salue cette annonce et appelle les autres grands assureurs, tels que AXA, Chubb, Allianz, et Sompo, à aller plus loin en introduisant des politiques solides pour mettre fin à leur soutien à l’expansion du pétrole et du gaz sur l’ensemble de la chaîne de valeur, y compris le GNL.  

Après avoir pris des engagements pour ne plus assurer une partie de la chaine de valeur de l’expansion pétro-gazière, à savoir les nouveaux champs de pétrole et de gaz, Generali, l’un des 20 premiers assureurs mondiaux (3), a annoncé avoir étendu ce périmètre : le principal assureur italien s’est engagé à ne plus assurer l’expansion pétro-gazière sur l’ensemble de la chaine de valeur, y compris les nouveaux terminaux GNL, nouveaux oléoducs et gazoducs et nouvelles centrales électriques alimentées au pétrole et au gaz.

Une décision importante concernant les nouveaux terminaux GNL, car les développeurs de GNL prévoient de tripler leur capacité de production au niveau mondial pour atteindre 1 480 millions de tonnes par an (4). Or, la semaine dernière, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a de nouveau mis en évidence les risques de surcapacité mondiale des installations d’exportation de GNL (5).

Mais si l’engagement de Generali de ne pas assurer les nouveaux projets pétroliers et gaziers en amont (upstream) s’applique quelle que soit l’entreprise qui les développe, sa nouvelle politique concernant le reste de la chaine de valeur ne s’applique qu’aux entreprises considérées par l’assureur comme des « retardataires de la transition ».

Cela signifie que certains projets d’infrastructures de transport et de stockage de pétrole et de gaz développés par des entreprises non-considérées comme “retardataires de la transition” pourraient encore être assurés par Generali. Si l’assureur italien semble ainsi croire que les entreprises qui développent ce type d’infrastructures pourraient encore parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050, l’Agence internationale de l’énergie dit le contraire: dans son scénario Net Zero Emissions, l’AIE indique clairement que tout nouveau champ pétrolier et gazier ou terminal d’exportation de GNL menace l’atteinte de l’objectif de neutralité carbone à 2050 (6).

L’annonce de Generali est une première dans le secteur de l’assurance mais ne va pas assez loin. S’il est le premier assureur au monde à inclure le gaz naturel liquéfié dans sa politique climat, et à s’engager à ne plus assurer l’expansion pétro-gazière sur l’ensemble de la chaine de valeur, il laisse encore la porte ouverte à une exception problématique. En s’autorisant encore à couvrir certains nouveaux projets pétro-gaziers d’entreprises dites en transition, Generali semble croire, à tort, qu’une entreprise développant de tels projets est une entreprise en transition. La science est pourtant claire : il n’y a pas de place pour de nouveaux projets pétroliers et gaziers si on souhaite préserver un monde assurable. Les Français AXA et SCOR doivent emboiter le pas de Generali en montrant encore plus d’ambition climatique pour mettre fin au soutien de l’expansion pétro-gazière sur toute sa chaine de valeur et sans exception.

Ariel le Bourdonnec, chargé de campagne assurance et réassurance

La décision de Generali est un signal clair au marché que les risques à long terme associés à l’expansion pétro-gazière sont devenus trop élevés. Les institutions financières italiennes devraient le reconnaître et cesser de financer les nouvelles infrastructures gazières du géant italien des énergies fossiles, Eni, conformément à la recommandation de l’AIE de maintenir le réchauffement planétaire en deçà de 1,5 °C.

Antonio Tricarico de l’ONG italienne ReCommon

Cette décision pourrait également avoir des répercussions à l’échelle mondiale.

Le changement de politique de Generali pourrait avoir des implications majeures pour les assureurs asiatiques, y compris Sompo, qui devront appliquer des politiques efficaces pour cesser d’assurer les nouveaux projets gaziers ayant des impacts climatiques significatifs, tels que le terminal d’exportation Rio Grande LNG sur la côte du Golfe.

Yuki Tanabe, directeur de programme au Centre japonais pour un environnement et une société durables (JACSES)

Les terminaux GNL sont des désastres pour les communautés dans lesquelles ils sont construits. Des recherches récentes ont établi un lien entre 60 décès prématurés par an et la pollution atmosphérique causée par ces terminaux d’exportation de méthane aux États-Unis, les pêcheurs ont vu des eaux abondantes pendant des années se vider, et les mêmes assureurs qui souscrivent à ces projets abandonnent les propriétaires. Des assureurs comme Chubb, AIG et Travelers n’ont plus de raisons de ne pas suivre l’exemple de Generali et d’éviter les risques de cette industrie destructrice.

Ethan Nuss, responsable de la campagne sur le financement des énergies au sein du Rainforest Action Network

Generali est également l’un des assureurs à avoir rejoint le Forum for Insurance Transition to Net Zero (FIT) (7), qui a été créé pour faire progresser l’action climatique dans le secteur de l’assurance, à l’inverse de nombreux autres grands assureurs. Lloyd’s of London, par exemple, n’a pas rejoint le FIT et reste le seul grand assureur européen à ne pas s’être engagé à mettre fin à la souscription de risques liés à l’expansion fossile.

L’assureur italien introduit également de nouvelles restrictions dans son portefeuille d’investissements pour les entreprises identifiées comme « retardataires de la transition». En particulier, Generali n’investira plus dans les nouvelles obligations émises par ces entreprises.

La politique de Generali visant à mettre fin à son soutien à l’expansion du pétrole et du gaz constitue désormais le standard le plus élevé parmi les grands assureurs non-vie à l’échelle mondiale. Cette annonce fait suite à celle prise récemment par l’assureur Zurich de ne plus assurer les nouveaux champs pétroliers et gaziers.

Les ONG appellent les autres assureurs à suivre l’exemple de Generali, en demandant notamment à AXA, Chubb et Sompo de mettre en place des politiques solides concernant l’expansion des énergies fossiles sur l’ensemble de la chaine de valeur, y compris le GNL.

Contacts :

Notes :

  1. Generali, Commitments to the environment and climate, 2024 (CLIMATE CHANGE STRATEGY – Technical Note)
  2. La méthodologie de Generali pour évaluer les entreprises du secteur de l’énergie et leur capacité de transition sera basée sur quatre piliers : la stratégie et l’engagement de décarbonation, l’allocation de capital et les plans d’expansion des énergies fossiles, la gouvernance climatique, les pratiques de lobbying. 
  3. Forbes, Forbes 2024: Top 20 largest insurance companies in the world, 2024 
  4. In the NZE (Net Zero Emissions) Scenario, investment in existing fields is needed to ensure that supply does not decline faster than demand, but no new conventional long lead time oil and gas projects are developed after 2023 and investment is much lower than today.IEA World Energy Outlook 2023, p135 
  5. Agence internationale de l’énergie, World Energy Outlook 2024, 2024 
  6. International Gas Union, 2023 World LNG Report, 2023 
  7. Voir Forum for Insurance Transition to Net Zero  
  8. Voir For a Few Dollars More – the fossil fuel policies of Lloyd’s managing agents 2, Reclaim Finance, October 2024 

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2024-10-22T18:19:26+02:00