Le rapport Banking on Climate Chaos, dont l’édition 2025 sera publié dans les prochains jours, analyse les financements accordés par les 65 plus grandes banques mondiales à l’industrie du charbon, du pétrole et du gaz sur toute la chaine de valeur. Réalisé par plusieurs ONG – Reclaim Finance, Rainforest Action Network, BankTrack, Center for Energy, Ecology, and Development, Indigenous Environmental Network, Oil Change International, Sierra Club et Urgewald -, il recense les prêts et les émissions d’actions et d’obligations d’environ 2730 entreprises actives dans les secteurs du charbon, du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale, sur la période 2021-2024.
Quelles entreprises fossiles font partie de l’analyse ?
Sont incluses les entreprises impliquées dans l’extraction, le transport, la transmission, la distribution, la combustion, le commerce ou le stockage de tout type de combustibles fossiles ou d’électricité d’origine fossile à l’échelle mondiale, qui figurent sur les listes suivantes établies par l’ONG Urgewald et disponibles publiquement : la Global Oil and Gas Exit List (GOGEL), la Global Coal Exit List (GCEL) et la Metallurgical Coal Exit List (MCEL). D’autres entreprises sont également identifiées grâce à la classification sectorielle de Bloomberg et des sources comme Global Energy Monitor, IJGlobal ou encore Enerdata.
Le rapport comptabilise notamment les financements de 706 entreprises ayant des projets d’expansion selon les informations de la GCEL, la MCEL ou la GOGEL : cela inclut notamment les entreprises développant de nouveaux projets de charbon, de nouveaux champs pétroliers et gaziers (upstream), des terminaux de gaz naturel liquéfié et de nouvelles pipelines (midstream), ou de nouvelles centrales à gaz.
Comment comptabiliser uniquement les activités fossiles des entreprises ?
Pour évaluer la juste part des financements des banques aux activités fossiles sélectionnées et ne pas sous-estimer ou surestimer les montants alloués, le rapport applique un ratio qui correspond à la part d’activités fossiles de l’entreprise au moment de la transaction.
Par exemple, sur les 1076 millions de dollars accordés par BPCE à TotalEnergies en 2024, seuls 969 millions ont été comptabilisés afin de refléter la part des énergies fossiles dans les activités de TotalEnergies.
100% des financements sont comptabilisés quand l’ensemble des activités des entreprises concernent le périmètre du rapport. Par exemple, les 385 millions de dollars accordés en 2024 par cette banque à la société de forages pétroliers Harbour Energy ont été entièrement comptabilisés car l’ensemble des activités de cette entreprise est en lien avec l’extraction fossile.
Quels types de financements sont analysés ?
Le choix de la comptabilisation des flux
Le rapport se concentre sur les flux financiers et non sur les stocks de manière à pouvoir capturer l’ensemble des financements soutenus par les banques, y compris la structuration d’émissions de titres (qui par nature n’apparaissent pas au bilan) et ainsi mesurer l’engagement continu des banques envers les énergies fossiles. Cela est d’autant plus essentiel qu’une baisse des stocks n’est pas incompatible avec une hausse des flux.
Chaque transaction, qu’il s’agisse d’un nouveau financement ou d’un refinancement, nécessite une prise de décision de la part de la banque et souligne ainsi son choix délibéré de soutenir une entreprise. Les deux sont donc comptabilisés.
Les types de transactions pris en compte
- Les prêts à terme (Corporate loans) : ils permettent à une entreprise de recevoir une somme forfaitaire qu’elle rembourse à une date convenue.
- Les facilités de crédit renouvelable (Revolving Credit Facilities ou RCF) : il s’agit de lignes de trésorerie qui permettent aux entreprises d’emprunter, de rembourser et de réemprunter de manière flexible, jusqu’à un plafond déterminé. Les RCF représentent plus d’un tiers des financements fossiles des banques sur la période analysée. Par manque de transparence du secteur, nous ne disposons pas de l’information concernant les montants réellement tirés par les entreprises sur ces lignes de trésorerie, et nous comptabilisons donc l’engagement total des banques. La comptabilisation du montant global disponible se justifie aussi par le fait que c’est sur cette base que sont calculées les commissions perçues par les banques ainsi que les exigences de fonds propres encadrées par les autorités de supervision à travers le mandat de gestion des risques financiers.
- Les émissions obligataires : Les obligations sont des titres de dette émis par des entreprises pour financer leurs activités. L’émetteur s’engage à rembourser la dette à une date précise, avec des paiements d’intérêts périodiques. Ces émissions ne seraient pas possibles sans l’intervention des banques, qui agissent comme intermédiaires essentiels : elles conseillent, assument le risque, assurent la commercialisation des obligations, et tirent des bénéfices importants de ces transactions. En général, les obligations sont vendues à des investisseurs, qui les échangent ensuite sur le marché secondaire.
- Les émissions d’action (primaire et secondaire) : Les actions permettent aux entreprises de lever des fonds en vendant des parts de leur capital à des investisseurs via les marchés boursiers. Comme pour les obligations, les banques jouent un rôle essentiel dans ce processus : conseil, souscription, distribution.