Entrée en fonction depuis le 1er décembre 2024, la Commission européenne s’efforce désormais de supprimer une partie des lois sur le climat et les droits humains. Cette offensive contre le vivant, sous couvert de « simplification », est critiquée de toute part. Pourtant, la dérégulation avance. Reclaim Finance s’est penché sur les rendez-vous réalisés par le vice-président exécutif Stéphane Séjourné, et a obtenu des documents inédits, notamment des emails ainsi que leurs pièces jointes, qui montrent un effort du secteur privé pour supprimer les règles qui les concernent, à rebours de tous les objectifs climatiques.
Depuis un an, la Commission européenne a une obsession : « simplifier ». Ce thème a été l’un des axes majeurs de la Commission, et notamment du Vice-président exécutif Stéphane Séjourné. Les travaux de ce dernier ont débouché sur la « loi Omnibus I » qui s’attaque aux lois sur le rapportage extra financier et sur le devoir de vigilance.
Qui Stéphane Séjourné rencontre-t-il ?
Reclaim Finance a analysé le processus d’élaboration de cette loi « Omnibus I ». Les résultats de l’analyse sont clairs : pour préparer la grande loi de dérégulation [1], le Vice-président exécutif n’a rencontré que des entreprises. Aucune ONG, aucun syndicat, aucune université. Il n’a rencontré que des représentants d’intérêts privés, motivés par des considérations économiques et financières privées. Dans la préparation de cette loi, le climat, les droits humains, la biodiversité n’ont jamais eu leur chance.
En étendant la fenêtre d’analyse jusqu’au 1er octobre 2025, soit sur 10 mois, les résultats ne sont guère plus encourageants. D’après les informations accessibles sur le site de la Commission européenne [2] le Vice-président exécutif n’a jamais organisé une réunion en tête-à-tête avec des ONG. Lors des rares rendez-vous où une ONG était présente dans la salle, la voix de cette dernière a été noyée par celles des entreprises.
Lors de la réunion du 5 septembre 2025 par exemple, 43 entreprises, un think tank et une fondation caritative étaient présents. Les voix qui ne représentaient pas directement des intérêts privés représentaient donc environ 4,4 %, contre 95,6 %.
En revanche, de très nombreux rendez-vous ont été organisés, souvent en tête-à-tête, avec des représentants du secteur privé : le MEDEF, la CPME, TotalEnergies, Engie ou encore Schneider Electric ont tous rencontré le VPE à plusieurs reprises.
Sur ces mêmes périodes, à chaque fois que le Cabinet du VPE rencontre une ONG, une association, un syndicat, une université ou une organisation internationale, il rencontre 9 entreprises. Un ratio de un-pour-neuf qui n’est pas propice au débat d’idées équilibré.
La loi omnibus est-elle taillée pour ou par les lobbies?
L’orientation des discussions autour de la simplification laissait donc peu de chance aux considérations non-économiques ou extra-financières et favorisait la reprise des demandes des puissants lobbies privés. Ce constat est exemplifié par la suppression de la clause exigeant l’étude de l’inclusion des services financiers au champ du devoir de vigilance, comme le révèle l’analyse des documents obtenus par Reclaim Finance.
Tous les grands représentants d’intérêts financiers (FBF, EBF, MEDEF, AFG, AFME…) ont ainsi demandé à exclure définitivement les services financiers de la directive sur le devoir de vigilance et ont obtenu gain de cause dans la proposition de la Commission.
Sans réel contradictoire, la Commission a donc décidé de déréguler en supprimant l’article qui prévoyait de rendre la finance responsable de ses effets.