Climat : Ofi Invest AM n’investira plus dans l’exportation de GNL

Paris, le 21 février 2025 : Ofi Invest AM a annoncé cette semaine mettre définitivement fin à ses investissements en dette obligataire pour toutes les entreprises développant de nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL). Cette mesure vient renforcer celles déjà en place sur l’exploration et la production de pétrole et de gaz. Ofi Invest AM devient ainsi le plus grand gestionnaire d’actifs français (1) à adopter une telle politique et donc à s’aligner pleinement sur les projections du scénario Net Zero Emissions de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) concernant le développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers et de terminaux d’exportation de GNL (2). Reclaim Finance salue la décision du gestionnaire et appelle les autres grands gestionnaires d’actifs, et en premier lieu le géant français Amundi, à mettre fin à leur immobilisme et à prendre des mesures similaires.

Avec ces nouvelles restrictions relatives au pétrole et au gaz (3), Ofi Invest AM met fin aux investissements obligataires contribuant au développement de nouveaux terminaux d’exportation de GNL. Ces mesures viennent renforcer les restrictions existantes d’Ofi Invest AM concernant les entreprises qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers – des restrictions renforcées suite à l’absence de progrès suffisants des entreprises engagées, dont TotalEnergies (4).

Alors que BNP Paribas AM avait récemment renforcé ses règles d’investissement dans le secteur pétro-gazier (5), Ofi Invest AM va donc désormais un cran plus loin en excluant les obligations des entreprises à la fois actives dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz (dit “upstream”) mais aussi pour celles actives dans les infrastructures de transport (dit “midstream”), qui comprend notamment les terminaux de GNL. Les autres investisseurs ayant pris des mesures aussi complètes sur la chaîne de valeur du pétrole et du gaz sont l’Ircantec, MACSF, Suravenir, Tikehau Capital et Eurazeo (6).

Les annonces d’Ofi Invest AM actent la prise de conscience que l’expansion pétro-gazière, quelle qu’elle soit, n’a pas sa place dans les portefeuilles d’un groupe engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050. La science est claire : nous devons mettre fin à tout nouveau projet d’énergies fossiles. Au vu du rythme de construction effréné de terminaux de GNL, ces nouvelles mesures sont l’exemple à suivre pour les grands noms de la gestion d’actifs comme Amundi.

Lara Cuvelier, chargée de campagne investissements soutenables

Avec cette nouvelle politique, Ofi Invest AM ne pourra par exemple plus fournir d’argent frais à Venture Global LNG, l’une des entreprises les plus actives dans le développement de nouveaux terminaux de GNL (7) et qui fait beaucoup appel aux acteurs financiers pour lever du capital (8). Une mesure importante à l’heure où l’essor de ces infrastructures met en péril l’atteinte des objectifs climatiques (9) mais causent aussi des impacts sociaux et environnementaux importants, dont des violations des droits humains (10).

Les entreprises développant de nouveaux terminaux d’exportation de GNL continuent pourtant de bénéficier des soutiens de nombreux investisseurs, les principaux investisseurs mondiaux ayant au moins 241 milliards de dollars d’exposition à l’expansion du GNL (11). Parmi eux, Amundi, filiale du Crédit Agricole, UBS AM, filiale de la banque suisse UBS ou encore Legal & General IM, qui n’ont pas encore adopté de politiques sur le GNL.

Ces gestionnaires d’actifs ont par exemple contribué à financer en 2024 TotalEnergies et BP, en investissant dans de nouvelles obligations (12), alors que les deux majors construisent de nouveaux terminaux de liquéfaction de LNG comme le projet “Papua LNG” pour l’une et le projet “Greater Tortue Ahmeyim” pour l’autre (13). Ces pratiques d’investissement tranchent donc avec leurs engagements à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Les pratiques d’Amundi font également preuve d’incohérence avec les pratiques du Crédit Agricole, sa maison mère, qui refuse désormais d’émettre les obligations de TotalEnergies et de BP (14).

Il est urgent que l’ensemble des gestionnaires d’actifs prennent exemple sur Ofi Invest AM et actent la fin de l’achat de nouvelles obligations liées à l’expansion fossile, tout en usant de leur pouvoir d’actionnaire pour bloquer la stratégie climaticide de ces entreprises.

Lara Cuvelier, chargée de campagne investissements soutenables

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Notes :

  1. Parmi les gestionnaires d’actifs évalués sur le Oil and Gas Policy Tracker développé par Reclaim Finance, Ofi Invest AM (180,8 milliards d’euros d’actifs sous gestion au 30/06/2024) est le plus grand à adopter de telles mesures après Eurazeo (35,5 milliards d’euros d’actifs sous gestion au 30/09/2024) et Tikehau Capital (45,6 milliards d’euros d’actifs sous gestion au 30/06/2024) qui avaient déjà adopté des politiques similaires.
  2. AIE, Net Zero by 2050, Mai 2021
  3. Ofi Invest AM, Politique pétrole et gaz et politique d’engagement associée, décembre 2024 qui remplace la précédente politique datant de juillet 2024.
  4. Ofi Invest AM excluait auparavant de ses nouveaux investissements les obligations des entreprises significativement exposées au pétrole et gaz non conventionnels et les entreprises qui développent de nouveaux champs pétroliers et gaziers à l’exception de quelques entreprises dont Oil and Natural Gas Corporation, Eni, Woodside Petroleum, TotalEnergies. Ofi Invest AM indiquait vouloir évaluer en 2025 et 2027 la stratégie de transition des entreprises restantes en portefeuille et exclure les entreprises ayant refusé de coopérer avec OFI AM ou ne montrant aucun signe clair d’évolution vers une démarche de transition. Ces entreprises sont désormais exclues des nouveaux investissements obligataires.
  5. Reclaim Finance, BNP Paribas AM n’investira plus dans les nouvelles obligations des entreprises pétro-gazières, novembre 2024.
  6. Les autres entités d’Aéma Groupe, la maison-mère d’Ofi Invest AM, n’ont quant à elles toujours pas adopté de telles mesures. Il s’agit pourtant d’investisseurs détenant des actifs importants comme la MACIF et Abeille Assurances.
  7. Source: Global Oil and Gas Exit List, Urgewald, 2024. Venture Global LNG est le plus grand développeur de GNL au monde, avec une capacité de liquéfaction de 71,1 millions de tonnes par an (Mtpa) en construction ou en projet. Alors que le scénario NZE de l’AIE prévoit qu’aucun nouveau terminal de liquéfaction ne sera nécessaire à l’avenir, Venture Global LNG est impliqué dans 4 projets de terminaux de liquéfaction : CP2 LNG, Delta LNG, Plaquemines LNG et Calcasieu Pass. Ces terminaux de liquéfaction sont tous situés dans le golfe du Mexique, largement approvisionnés par les gisements de gaz de schiste américains.
  8. Reclaim Finance, Gaz gelé, planète en ébullition : comment le soutien des banques et des investisseurs au GNL alimente une catastrophe climatique, décembre 2024. Venture Global a conclu 455 transactions avec les banques analysées dans ce rapport entre 2021 et 2023, Bank of America, Mizuho, ING et Santander étant impliquées dans 25 transactions ou plus. Ces banques, ainsi que BPCE, ont participé à l’émission d’une obligation de 1,5 milliard de dollars par Venture Global en juillet 2024. Les 400 investisseurs analysés sont exposés à Venture Global pour près de 13 milliards de dollars (à mai 2024).
  9. 156 nouveaux projets de GNL sont prévus d’ici 2030, dont 63 terminaux d’export. Ces derniers contribueraient à émettre 10 gigatonnes de gaz à effet de serre, soit près de l’équivalent des émissions annuelles des centrales à charbon en activité au niveau mondial.
  10. Voir le rapport cité en note 8.
  11. Voir le rapport cité en note 8. Les investisseurs des dix pays où l’expansion du GNL est la plus soutenue – États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Norvège, France, Japon, Allemagne, Suisse, Chine et Corée du Sud – détiennent 241 milliards de dollars d’exposition à l’expansion du GNL (données à mai 2024).
  12. Obligations émises par TotalEnergies SE et BP PLC en 2024, source: Terminal Bloomberg, octobre 2024.
  13. Reclaim Finance, Evaluation des stratégies climat des entreprises pétro-gazières, 2024.
  14. A l’inverse, BNP Paribas AM vient d’adopter de nouvelles mesures afin de mettre ses pratiques en cohérence avec sa maison-mère BNP Paribas.

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2025-02-21T15:13:12+01:00