Copublié avec Transport & Environnement
À contre-courant des remises en cause actuelles des objectifs climatiques dans le secteur automobile, le Crédit Agricole annonce de nouveaux engagements pour l’électrification de ses activités de financement automobile. Transport & Environment (T&E) et Reclaim Finance saluent un signal fort et appellent le reste du secteur bancaire à s’aligner.
Une ambition claire dans un moment de flottement
Alors que la révision du règlement européen CO₂, prévue en 2026, alimente les appels au recul sur la décarbonation du transport routier, plusieurs constructeurs automobiles remettent en cause les objectifs européens de transition électrique. Dans ce contexte, T&E et Reclaim saluent les engagements du Crédit Agricole, qui prend le contre-pied en rehaussant son niveau d’ambition.
Le groupe, acteur majeur du marché, s’engage à financer, d’ici 2028, une part de véhicules électriques supérieure de 10 points à la moyenne du marché européen, sur l’ensemble de ses financements annuels de véhicules neufs (prêts et leasing). Ainsi, si le marché européen atteint 50 % de véhicules électriques en 2028, le Crédit Agricole visera 60 %. L’objectif couvre toutes les entités concernées du groupe (CA Auto Bank, Drivalia, etc.), y compris la coentreprise de leasing Leasys avec Stellantis.
Autre avancée : le groupe exclut désormais les véhicules hybrides rechargeables de ses cibles, rompant ainsi avec une pratique de greenwashing fréquente dans le secteur, ces motorisations ayant prouvé leur inefficacité sur le plan climatique [1].
Il s’agit d’un signal fort envoyé par le Crédit Agricole. Le leadership climatique existe encore dans la filière automobile. Il est essentiel que ce signal soit entendu et pris en compte à Bruxelles.
Léo Larivière, responsable transition automobile de T&E
Cet engagement fait suite à un dialogue technique approfondi entre le Crédit Agricole, T&E et Reclaim Finance [2] et s’accompagne du lancement d’un chantier stratégique baptisé NZMobility, visant à identifier les leviers commerciaux, financiers et opérationnels à activer pour atteindre les objectifs fixés. Les deux ONG saluent cette méthode, qui démontre la pertinence d’un travail collectif entre experts des politiques climatiques et les banques. Elles resteront vigilantes quant à sa mise en œuvre concrète et à la progression effective du mix électrique. Le groupe devra par ailleurs poursuivre cette dynamique au-delà de 2028, afin de garantir la fin des financements de véhicules thermiques à l’horizon 2035.
Une nouvelle norme pour le secteur : aux autres banques de s’aligner
Cet engagement rappelle le rôle central des acteurs financiers dans la transition électrique, en particulier via leurs activités de location en leasing et de prêts automobiles. T&E et Reclaim Finance appellent les autres banques et leurs filiales leasing, notamment Société Générale (Ayvens) et BNP Paribas (Arval), à suivre cet exemple [3].
BNP Paribas et Société Générale ont reculé ces derniers mois sur leurs ambitions électriques. L’exemple du Crédit Agricole montre qu’il est possible de rester crédible, transparent et ambitieux. Nous sommes à un moment de vérité : soit les banques s’engagent dans la transition, convaincues des bénéfices individuels et collectifs à sortir du thermique, soit elles s’arc-boutent sur un modèle dépassé.
Lucie Pinson, directrice exécutive de Reclaim Finance
Une cohérence climatique à renforcer
Malgré ce progrès dans le secteur automobile, la stratégie climat du groupe Crédit Agricole reste caractérisée par des contradictions internes. Les dernières analyses de Reclaim Finance montrent notamment que si la banque a cessé de participer aux émissions d’obligations des majors pétro-gazières, ses filiales Amundi (premier gestionnaire d’actifs européen) et Crédit Agricole Assurances continuent d’investir dans ces instruments [4]. Cette incohérence nuit à la crédibilité globale de la stratégie climat du groupe et devra être corrigée.