La méthodologie derrière le Banking on Climate Chaos 2023

Issu de la collaboration entre Reclaim Finance, Rainforest Action Network, BankTrack, Indigenous Environmental Network, Oil Change International, Sierra Club et Urgewald, et soutenu par plus de 600 organisations de 75 pays du monde entier, dont les Amis de la Terre France, le rapport Banking on Climate Chaos 2023 totalise les prêts et les émissions d’actions et d’obligations de plus de 2 000 entreprises [1] dans les secteurs du charbon, du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale sur la période 2016-2022. 60 banques, dont BNP Paribas, sont couvertes par le rapport. La méthodologie est exactement la même depuis 2016.

Les données financières proviennent essentiellement de Bloomberg, et sont complétées avec certaines transactions à l’aide de la base de données IJ Global.

La part des transactions attribuées à chacune des banques couvertes par le rapport suit la méthodologie Bloomberg (les league tables) qui est utilisée tous les ans depuis la parution du BOCC. Cette méthodologie est largement utilisée dans le monde entier pour suivre la participation des banques aux transactions financières internationales mondiales: elle met l’accent sur les banques qui jouent un rôle de premier plan dans la mise sur le marché de nouvelles transactions. Les league tables de Bloomberg sont reconnues et utilisées par les acteurs financiers eux-mêmes. Y recourir nous permet de faire face à l’opacité du secteur financier, l’absence de publication détaillée par les banques de leurs services financiers et la difficulté pour y avoir accès, même sur les bases de données payantes.

Les transactions analysées sont celles réalisées sur la période 2016 à 2022 pour l’ensemble des entreprises sélectionnées dans le BOCC 2023. La logique de sélection des entreprises fossiles est identique d’une année sur l’autre. Pour les entreprises ayant été ajoutées lors de l’édition 2023 du BOCC [2], les flux financiers vers ces entreprises ont été calculés rétrospectivement depuis 2016 afin de bien appréhender l’évolution des financements année après année.

Seule une partie des financements accordés par une banque à chaque entreprise couverte par le Banking on Climate Chaos (BOCC) est comptabilisée. Cette partie est équivalente à la part des activités de l’entreprise dans les énergies fossiles au moment de la transaction. Par exemple, sur les 542 millions de dollars accordés par BNP Paribas à EDF en 2022, seuls 106 millions ont été comptabilisés afin de refléter la part des énergies fossiles dans les activités d’EDF. En revanche, les 2 milliards de dollars accordés en 2022 à la société de forages pétroliers Saipem ont été entièrement comptabilisés. Ainsi, si un groupe achète une autre entreprise active dans les énergies fossiles, la part de ses activités dans les énergies fossiles augmentent et la part des financements par une banque comptabilisée comme allant aux énergies fossiles augmente également. Inversement, ces parts diminuent lors de l’acquisition par un groupe d’une entreprise inactive dans les énergies fossiles.

Le BOCC 2023 montre que BNP Paribas a accordé 166 milliards de dollars aux énergies fossiles depuis 2016, dont 21 milliards en 2022, en hausse de 22% par rapport à 2021. Le poids de BNP Paribas dans le financement aux énergies fossiles s’explique par son soutien aux 100 plus gros développeurs d’énergies fossiles, en particulier les grandes entreprises pétrolières et gazières européennes telles que BP, Eni, Shell et TotalEnergies. La hausse de 2022 s’explique en partie par un soutien accru de BNP Paribas à la major française cette année-là.

La méthodologie est la même depuis des années et pour toutes les banques. A noter que les banques françaises, y compris BNP Paribas, ont largement utilisé le rapport les années où leurs financements leur permettaient de se mettre en avant. Il serait mal avisé de leur part de critiquer la méthodologie aujourd’hui.

Le rapport ne mesure pas l’exposition des banques aux énergies fossiles, mais comptabilise les prêts (ce qui permet de calculer l’exposition de la banque) ainsi que les émissions d’actions et d’obligations facilitées par les banques. Autrement dit, le rapport comptabilise les flux et non les stocks. Une banque comme BNP Paribas peut donc voir son exposition aux énergies fossiles rester stable voire diminuer mais ses flux de financements augmenter.

Notes :

[1] Le BOCC 2023 comptabilise les flux des 60 plus grandes banques mondiales vers 3 200 entreprises, faisant partie de plus de 2 000 groupes distincts.

[2] Les mises à jour annuelles des Global Coal Exit List (GCEL) et Global Oil & Gas Exit List (GOGEL) d’urgewald peuvent entraîner une variation du nombre d’entreprises, à logique de sélection identique. De plus, le nombre d’entreprises analysées est passé de 2700 lors du BOCC 2022 à 3200 lors du BOCC 2023, en raison de recherches additionnelles effectuées et d’une meilleure couverture de l’industrie fossile par les bases de données utilisées lors de la recherche.

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2023-05-17T11:44:13+02:00