MACSF, deuxième assureur-vie à tourner le dos au GNL

L’assureur des professionnels de santé devient le deuxième assureur-vie engagé à ne plus réaliser de nouveaux investissements dans les entreprises développant des nouveaux champs pétro-gaziers, de nouveaux pipelines et de nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié (GNL) (1). Un pas décisif face à l’expansion pétro-gazière pour MACSF dont la dernière copie de sa politique énergies fossiles se concentrait uniquement sur les producteurs de pétrole et gaz non-conventionnels (2). Si MACSF doit encore aligner son offre en unités de compte (UC) avec sa politique énergies fossiles, Reclaim Finance salue ses nouvelles mesures et appelle les grands assureurs-vie, notamment les bancassureurs  Crédit Agricole Assurances, BNP Paribas Cardif et BPCE Assurances à s’inspirer des meilleures pratiques désormais définies par MACSF et Suravenir (3). 

L’assureur-vie français a publié en décembre dernier la mise à jour de sa politique énergies fossiles. Cette nouvelle politique respecte les minima du nouveau label ISR face à l’expansion des hydrocarbures (upstream) et va encore plus loin sur la question des développeurs de nouvelles infrastructures de transport et de stockage (midstream).

Fin des nouveaux investissements du fonds euro pour les développeurs upstream et midstream

L’assureur mutualiste est le deuxième assureur-vie français après  Suravenir à stopper ses nouveaux investissements à destination des entreprises développant de nouvelles infrastructures de stockage et de transport comme les nouveaux pipelines et terminaux de GNL. Ces projets sont pourtant tout aussi incompatibles avec l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C que ne le sont les nouveaux champs pétroliers et gaziers. Ils sont désormais 10 assureurs-vie à ne plus réaliser de nouveaux investissements dans des entreprises développant de nouveaux champs pétro-gaziers (4).

L’engagement de MACSF confirme une dynamique positive au sein des petits et moyens assureurs-vie français qui se démarquent de plus en plus des grands bancassureurs très en retard en matière d’action climatique (ils collectent ensemble près de deux tiers de l’assurance-vie chaque année) (5). C’est le cas de Crédit Agricole Assurance, BNP Paribas Cardif, BPCE Assurances qui se contentent d’exclure des entreprises produisant du pétrole et du gaz non-conventionnel, bien en-deçà des derniers signaux politiques envoyés par le gouvernement avec la réforme du label ISR.

Concrètement, MACSF n’achètera plus de nouvelles obligations de ces développeurs pétro-gaziers. L’assureur ne pourra par exemple plus fournir d’argent frais à TotalEnergies, première entreprise cotée au monde à développer de nouveaux champs pétroliers et gaziers (6) et qui se classe également dans le top 20 des entreprises les plus actives dans le développement de nouveaux terminaux de GNL (7).

Aligner progressivement son offre en unités de compte (UC) avec sa nouvelle politique

L’engagement d’un arrêt des nouveaux investissements dans les développeurs upstream et midstream s’applique uniquement aux actifs gérés en direct dans le fonds euro de MACSF, laissant de côté son offre en UC. Ce double-standard entre le fonds euro et les UC s’observe également chez les autres assureurs-vie. Un tel angle mort des politiques énergies fossiles permet encore aux assureurs-vie de distribuer à leurs clients des UC exposées à des entreprises désormais exclues de l’univers d’investissements de leur fonds euro.

Dans son analyse des reporting de durabilité (article 29 LEC) des assureurs-vie (8), l’ACPR les a d’ailleurs rappelés à l’ordre en leur demandant plus de transparence sur l’exposition de leur offre UC aux entreprises des industries fossiles (charbon, pétrole et gaz). Pourtant obligatoire, cette exigence réglementaire n’est toujours pas respectée par la majorité d’entre eux, illustrant le retard pris par les assureurs-vie dans le déploiement de leurs engagements climatiques à leur offre UC.

Arrêt des nouveaux investissements et engagement, assurer la cohérence entre flux et stock

Face à l’expansion des énergies fossiles, des politiques d’investissements mêlant à la fois engagement et exclusions sont nécessaires. Ces exclusions sont en réalité un arrêt des nouveaux investissements (flux) dans les entreprises responsables du développement de nouveaux projets d’énergies fossiles et non un désinvestissement total. Les actions déjà détenues en portefeuille (stock) doivent elles être utilisées pour répondre aux objectifs climatiques de l’assureur-vie et sanctionner les stratégies climaticides des grands développeurs pétro-gaziers. Les droits de vote liés à ces actions doivent sanctionner les administrateurs (9) des entreprises développant de nouveaux champs pétroliers et gaziers ainsi que de nouveaux terminaux de GNL en s’opposant notamment à leur renouvellement et leur rémunération.

Du côté des dividendes, ces milliards versés aux actionnaires sont autant d’argent ne contribuant pas au financement des solutions. Les investisseurs engagés face au dérèglement climatique devraient alors refuser ces dividendes et sanctionner les directions des entreprises privilégiant le versement de juteux dividendes à l’action climatique.

Si des améliorations sont encore possibles, cette nouvelle politique énergies fossiles représente une avancée majeure pour les engagements climatiques du groupe MACSF et envoie un signal fort : l’expansion pétro-gazière, upstream ou midstream, conventionnel ou non conventionnel, n’a plus sa place dans les portefeuilles d’assureurs-vie engagés à atteindre la neutralité carbone à 2050. Reclaim Finance appelle désormais les plus grands assureurs-vie de la place de Paris comme Crédit Agricole Assurances, BNP Paribas Cardif et BPCE Assurances à emboîter le pas sur MACSF dès cette année. 

Pour plus d’informations, consulter les recommandations de Reclaim Finance à destination des assureurs-vie pour une assurance-vie sans soutien à l’expansion des énergies fossiles.

Notes :

  1. MACSF, Politique sectorielle MACSF 2023, 2023.
  2. La rapport ISR 2022 de MACSF mentionnait un arrêt des nouveaux investissements dans les entreprises dont la production d’énergies fossiles non conventionnelles représentent plus de 30% de leur production annuelle d’énergies fossiles.
  3. Suravenir, Rapport Loi Énergie Climat 2022, 2023
  4. Abeille Assurances (groupe Aéma), CNP Assurances, Groupama, Macif (groupe Aéma), Maif, Matmut, AG2R La Mondiale, Société Générale Assurances, Suravenir (Crédit Mutuel Arkéa) et désormais MACSF.
  5. France Assureurs, L’assurance française données clés 2022, 2023
  6. Selon la base de données Global Oil and Gas Exit List, TotalEnergies est la 6ème entreprise au monde à développer le plus de nouvelles ressources pétro-gazières, derrière 5 compagnies pétrolières nationales (non-cotées sur les marchés financiers) aussi appelées NOC (National Oil Companies)
  7. Selon la base de données Global Oil and Gas Exit List, TotalEnergies se place en 18ème position des plus importants développeurs de nouveaux terminaux de GNL.
  8. ACPR, Loi Énergie Climat : les assureurs doivent poursuivre leurs progrès, 2024
  9. Pour plus d’informations, consulter le guide de Reclaim Finance à destination des investisseurs pour des pratiques d’engagement et de vote plus efficaces.

lire aussi

2024-02-09T10:32:48+01:00