Paris, le 10 décembre 2024 – Malgré une facture climatique toujours plus lourde et un risque grandissant d’un monde inassurable, les grands (ré)assureurs continuent d’exacerber le dérèglement climatique, en soutenant l’expansion des énergies fossiles. C’est ce que dénoncent les membres de la coalition Insure our Future, dont Reclaim Finance, qui publie son nouveau classement “Insurance Scorecard” des politiques climat des 30 des plus grands (ré)assureurs au monde (1). Si certains ont réhaussé leurs engagements cette année, les français AXA et SCOR restent au point mort et continuent de perdre des places. Face à l’action insuffisante et désordonnée des (ré)assureurs, Reclaim Finance appelle la Commission européenne à agir pour qu’ils mettent fin à leur soutien à l’expansion fossile.
Dans son nouveau rapport, Insure our Future révèle qu’1/3 des pertes assurées liées à des phénomènes météorologiques dans le monde sont attribuables au dérèglement climatique, soit 600 milliards de dollars en quasi vingt ans (2). Une facture climatique toujours plus lourde pour les (ré)assureurs (3), avec des conséquences majeures pour les populations confrontées à des coûts grandissants et à des risques croissants de se retrouver sans protection : en France, entre 1000 et 2000 communes ont vu leur cotisation exploser ou leur contrat se résilier début 2024 (4), notamment en raison des risques climatiques.
Malgré l’impact de ces risques sur leurs assurés, les assureurs continuent de soutenir l’expansion des énergies fossiles. Et ce, même si l’intérêt économique parait faible : en 2023 les compagnies d’assurance étudiées ont perdu presque autant d’argent en indemnisant les dégâts causés par des catastrophes climatiques qu’elles n’en ont gagné en assurant des entreprises du secteur des énergies fossiles (5).
Si en 2024, certains assureurs ont réhaussé leurs engagements, ce n’est pas le cas des (ré)assureurs français : AXA et SCOR restent au point mort et perdent chacun une place au classement général, désormais respectivement à la 6e et 11e place. En cause notamment, l’absence de mesures sur l’assurance des nouveaux terminaux d’exportation de GNL, malgré leur impact sur le climat (6), et des politiques toujours lacunaires sur le pétrole et le gaz (7).
Les deux Français sont devancés par l’assureur italien Generali, qui prend la première place grâce à ses nouvelles mesures prises en octobre notamment sur les terminaux d’exportation de GNL (8), ainsi que par Zurich, premier assureur engagé à ne plus couvrir de nouveaux projets de charbon métallurgique.
Si AXA et SCOR avaient montré l’exemple sur le charbon, c’est loin d’être le cas sur le pétrole et le gaz, et encore moins le gaz naturel liquéfié. Ils font aujourd’hui le choix de profiter de la crise climatique pour augmenter leur prix voire abandonner certains assurés tout en continuant d’alimenter le problème en assurant l’expansion du pétrole et du gaz. Et quand ils font mine de s’engager, leurs promesses sont entachées d’exception. Devant ce manque de volonté criant, la Commission européenne doit prendre les devants et agir pour que les assureurs arrêtent enfin de soutenir l’expansion fossile.
Ariel le Bourdonnec, chargé de campagne à Reclaim Finance
L’autorité européenne de surveillance du secteur de l’assurance (EIOPA) a récemment proposé une surcharge en capitaux propres pour les actifs fossiles détenus par les assureurs, actant ainsi le caractère risqué de ces actifs (9).
Face à la crise climatique, la Commission européenne doit appliquer cette recommandation de l’EIOPA, et aller plus loin en exigeant des (ré)assureurs un arrêt de leur soutien aux nouveaux projets pétroliers et gaziers ainsi que les nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié, sans exception. Reclaim Finance appelle la Commission européenne à rendre ce critère essentiel dans les plans de transition qui devront être publiés l’année prochaine par tous les acteurs financiers, dont les assureurs, en vertu de la directive européenne CSRD (10).