de nouvelles capacités au charbon en 2024
L’énergie produite à partir du charbon, première source de pollution mondiale, est en déclin dans de nombreux pays. En dehors de la Chine et de l’Inde, la capacité en développement a diminué pour la dixième année consécutive. Seuls huit pays ont proposé de nouvelles centrales à charbon en 2024.
Pourtant, à cause de sa croissance rapide continue en Inde et en Chine ces dernières années et malgré une légère baisse de la demande en charbon au premier semestre 2025, sa capacité continue d’augmenter à l’échelle mondiale, même si c’est à un rythme plus lent qu’auparavant.
Malgré la concurrence des énergies renouvelables à faible coût, 44 GW de nouvelles capacités au charbon ont été mises en service en 2024 contre 70 GW en 2023. Bien qu’il s’agisse du niveau le plus bas de ces vingt dernières années, seuls 25 GW de capacités ont été mis à la retraite, ce qui représente encore une augmentation nette de 19 GW de capacités issues du charbon dans le monde. Or, toute nouvelle expansion charbon contrevient au scénario Net Zero Emissions (NZE) de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) visant la neutralité carbone d’ici à 2050 pour éviter les pires impacts du changement climatique.
Afin de maintenir l’objectif de 1,5°C à portée de main, il est urgent de stopper la construction de nouvelles infrastructures charbon et d’éliminer rapidement les centrales électriques et les mines de charbon existantes d’ici à 2030 pour l’Europe et les pays de l’OCDE, et d’ici à 2040 à l’échelle mondiale.
Les engagements internationaux visant à libérer le monde de sa dépendance au charbon commencent à prendre de l’ampleur. Mais cela ne suffit pas. Alors que les pays de l’OCDE éliminent progressivement le charbon, on observe une disparité des engagements et une polarisation géographique croissante des pays développeurs de charbon en Asie : la Chine et l’Inde ont représenté à elle seules 92% des propositions de nouvelles capacités charbon en 2024.
Parallèlement, même si la construction de centrales au charbon s’arrêtait aujourd’hui, les centrales existantes devraient épuiser les deux tiers du budget carbone mondial. C’est pourquoi le développement du charbon ne doit pas seulement être arrêté dès maintenant, mais il faut orienter un financement massif vers l’accélération de la fermeture anticipée des centrales en activité.
Le secteur financier privé et les gouvernements ont la responsabilité de financer la sortie du charbon et de permettre le déploiement rapide d’énergies soutenables. Pour ce faire, les institutions financières privées doivent adopter des politiques alignant leurs activités de financement du secteur du charbon sur une trajectoire de 1,5°C sans dépassement ou avec un faible dépassement, et cesser tout type de soutien à de nouvelles mines, centrales et infrastructures. Cela ne peut réussir qu’avec une forte intervention des autorités publiques et des régulateurs.
accélérer LA SORTIE DU CHARBON
Le charbon est encore utilisé pour produire plus d’un tiers de l’électricité mondiale. Il existe d’énormes différences entre les pays et les régions en termes de dépendance au charbon et de rythme de sortie du charbon. L’Afrique du Sud et l’Inde comptent toujours sur le charbon pour respectivement près de 80% et 75% de leur production d’électricité, et la Chine a atteint un nouveau record de nouvelles capacités au charbon avec 94 GW en construction lancées en 2024.
La fermeture des centrales au charbon dans les contextes socio-économiques et politiques des différentes régions et pays tout en garantissant l’accès à l’énergie et des transitions justes, est un défi complexe. Bien que l’âge moyen des centrales au charbon aux États-Unis et en Europe dépasse 40 ans, dans la région Asie-Pacifique, les centrales ont en moyenne moins de 15 ans.
Il y a toutefois des bonnes nouvelles puisque la construction de nouvelles centrales à charbon est globalement en ralentissement, et les infrastructures charbon en Europe ferment progressivement. Aux Etats-Unis la capacité du parc charbonnier a diminué de moitié depuis 2011 même si ce progrès est désormais menacé par l’administration du Président Trump.
Cependant, le retrait du charbon est loin d’être suffisamment rapide. Pour l’accélérer, la communauté internationale a engagé de nouvelles initiatives pour financer la fermeture des centrales dans les pays en développement dépendants du charbon, telles que les Just Energy Transition Partnerships (JETPs) lancés durant la COP26 à Glasgow en 2021, et le Energy Transition Mechanism (ETM) de la Banque asiatique de développement.
En raison de la lenteur de ces initiatives, certains gouvernements, institutions financières et fondations philanthropiques font la promotion du concept de « crédits de transition » de compensation carbone mis en vente pour aider à financer le rachat de centrales à charbon. Cependant, ces compensations pour la transition du charbon risquent de reproduire tous les problèmes qui ont affecté les compensations dans d’autres secteurs : en particulier, des bénéfices exagérés de réduction d’émissions et la vente de compensations fictives à des pollueurs qui les utilisent pour éviter de réduire leurs propres émissions.
Au lieu de se concentrer sur des accords volontaires qui compensent les investisseurs privés dans des centrales à charbon individuelles, les gouvernements ainsi que les secteurs privé et philanthropique devraient se concentrer sur des réformes du secteur de l’énergie qui imposent la fermeture des centrales à charbon et accélèrent le déploiement rapide des énergies durables.
de la capacité opérationnelle mondiale (1 684 GW) de centrales à charbon n’ont pas d’engagement de fermeture ou de suppression progressive.
Centrales à charbon dans le monde doivent être retirées d’ici 2040
L’éCHEC DES POLITIQUES QUI POURSUIVENT L’EXPANSION DU CHARBON
Certaines institutions financières prétendent sortir du charbon alors qu’elles continuent de soutenir des entreprises très actives dans le charbon ou des entreprises avec des plans d’expansion du charbon. Celles qui ont des engagements de neutralité carbone prenant position contre l’expansion du charbon ne font pas exception à ce fait : dix ans après l’Accord de Paris, les engagements volontaires des acteurs financiers restent très insuffisants et prouvent qu’une réglementation est nécessaire. Les acteurs publics doivent garantir la fin de tous les services financiers aux entreprises qui n’ont pas de plans pour une sortie totale du charbon avant 2030 dans l’OCDE et 2040 dans le reste du monde (avec des exceptions pour le soutien pour les projets de fermeture et transition juste).
Trop de politiques relatives au charbon permettent encore de soutenir l'expansion.
Trop de politiques charbon ne couvrent pas tous les services financiers ou l'ensemble de la chaîne de valeur du charbon.
DES SORTIES CRÉDIBLES INTÉGRANT LES ÉNERGIES SOUTENABLES
Les institutions financières publiques seules ne peuvent pas éliminer le charbon. Les pays avec de jeunes parcs de centrales au charbon ne seront pas disposés à fermer ces centrales tôt sans alternatives énergétiques viables. Si les alternatives sont compétitives en termes de coûts, les financements privés restent encore peu dirigés vers les énergies soutenables et les améliorations de l’infrastructure du réseau. Les institutions financières doivent s’engager à allouer six dollars à l’approvisionnement en électricité soutenable pour chaque dollar alloué aux énergies fossiles. Pour une réelle transition globale du charbon, une juste part de ces fonds devrait être allouée aux économies du Sud.
Les pays du Nord ayant bénéficié d’un développement économique lié en grande partie à une production à base de charbon depuis la Révolution industrielle, ont une responsabilité historique de soutenir la sortie du charbon et le développement d’alternatives dans les pays dépendants du charbon. Cela inclut la pression sur le secteur privé qui devra représenter 60% des investissements dans les énergies dites propres d’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans les économies du Sud global.
Mais ces gouvernements doivent soutenir le déploiement d’un approvisionnement en électricité soutenable – en évitant les fausse solutions non-soutenables et intensives en carbone comme la biomasse ou les technologies non éprouvées, probablement extrêmement chères, et avec des bénéfices climatiques très douteux, comme la capture de carbone et la co-combustion avec de l’ammoniac ou de l’hydrogène. Le gaz, présenté à tort comme une énergie de transition au charbon, reste une énergie polluante qui doit être évitée au profit d’énergies réellement soutenables. Les décideurs politiques doivent également garantir l’inclusion des populations locales dans des plans de transition qui n’impactent pas négativement l’emploi ou l’environnement. En fin de compte, les partenariats internationaux comme les JETPs et le Coal Transition Accelerator (CTA) lancé en 2023 par Emmanuel Macron ne peuvent aboutir que s’ils se traduisent en financements alloués à des conditions abordables pour une sortie socialement et environnementalement juste du charbon vers des énergies soutenables.
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